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Le 20 aoû 2014

Scalese : Plexus Solaire

Nous avons demandé au parrain de notre concours de nouvelles polar, l'écrivain Stephan Ghreener, d'interviewer des confrères et des consoeurs pour tenter de nous offrir divers regards sur le métier d'écrivain aujourd'hui. Et ce sur fond de changements majeurs dans l'édition. Alors, écrire, plaisir ou travail ? Et quel conseil peut-on donner à un auteur débutant ? Premier à répondre, l'auteur et scénariste Laurent Scalese. Parmi ces romans, il y a bien sûr, "La cicatrice du diable". Et les fans de séries peuvent le remercier pour Cherif.

1) Écrire aujourd'hui pour toi, c'est quoi ? Un plaisir, du travail ou les deux ?

En ce qui me concerne, « l’écriture vient du plexus solaire », comme le disait Raymond Chandler. Certains confrères disent qu’ils ne souffrent pas du tout, que ce n’est que du plaisir. Ils écrivent n’importe où, dans des lieux publics, en écoutant de la musique, en regardant une série télé… Ce n’est pas mon cas. Pour donner le meilleur, je dois m’isoler, dans mon bureau, dans ma bulle, dans mon monde, avec mes personnages. Tel un artisan, je travaille chaque phrase, je suis en permanence à la recherche du mot le plus juste. Si j’accorde beaucoup d’importance à l’histoire, à la narration, à la structure, j’en accorde aussi au style, je le cisèle. La langue, la syntaxe, je les aime d’amour. Du coup, je les soigne aux petits oignons. Cela demande du temps. En fait, je dirais que l’écriture est un mélange de souffrance et de plaisir. Si c’était aussi simple, ce ne serait pas amusant. Chaque fois, c’est un retour à la case départ et un défi. Je me pose la même question, lancinante : vais-je y arriver, cette fois encore ?

2) S'il y avait un seul conseil à donner à un auteur débutant ?

J’ai du mal à donner des conseils car j’estime qu’un artiste, quel que soit son domaine, est en apprentissage toute sa vie. Par contre, je suis sûr d’une chose : écrire est un métier, il y a des règles à respecter, cela demande du travail, de la discipline. Le plus dur est de trouver le bon mot, le bon rythme, la bonne musicalité. Éviter d’abuser des adverbes et des adjectifs : imaginez un comédien qui surjoue, il crie plus qu’il ne parle, de peur qu’on ne l’entende pas, qu’on ne le comprenne pas. Éviter les formules toutes faites, les lieux communs. Surtout, avoir de vrais personnages, profonds, attachants, des personnages qu’on suivrait au bout du monde. Transmettre l’émotion, car tout art doit avant tout être vecteur d’émotion, sinon cela n’a aucun intérêt.

3) Tu es publié depuis de nombreuses années. Quel est ton regard sur l'édition en général et sur le numérique ?

La crise touche le livre, ce n’est un secret pour personne, mais je pense que ceux qui s’en sortiront au final seront les plus audacieux, ceux qui sauront prendre des risques. Il y a beaucoup de commerçants dans ma famille, mes années dans le métier m’ont appris une chose : en période de crise, ne rien faire et attendre, reproduire sans cesse les mêmes schémas, copier les concurrents, c’est aller droit dans le mur. Il faut oser, plus que jamais. Concernant le numérique, j’ai eu la bonne surprise de voir mes ventes augmenter depuis 2013. À mon avis, le numérique ne remplacera jamais le papier – les gens sont affectivement liés au livre papier, surtout en France -, mais il va progresser, c’est une évidence.

4) Ton auteur de polar préféré ?

Tous ceux que j’ai lus, relus, tous ceux que j’admire ne sont malheureusement plus de ce monde. Je les considère comme les maîtres des romans noir et policier. Dashiell Hammett, Raymond Chandler, Horace McCoy, William Irish, James Hadley Chase, Leigh Brackett (elle a aussi écrit la première mouture du scénario de « L’empire contre-attaque »)… Quelques français : Jean-Patrick Manchette, le tandem Boileau-Narcejac et, bien sûr, l’immense Frédéric Dard. Mais si je ne devais en citer qu’un seul, ce serait, sans aucune hésitation, Jim Thompson, l’auteur, entre autres, de « 1275 âmes » et des « Arnaqueurs », deux chefs-d’œuvre du roman noir. Je dirais même que Thompson était beaucoup plus qu’un écrivain de romans policiers, c’était un écrivain tout court, il avait une vraie vision, un vrai point de vue sur l’Amérique et ses petites gens. Un génie qui a fini seul, alcoolique et fauché… Aujourd’hui, j’ai un peu de mal à m’y retrouver, tant de polars se ressemblent, usent et abusent des mêmes thématiques : à commencer par le mal et ses origines… Je lis, pour savoir ce qui se fait, mais je suis souvent déçu. Je ne retrouve pas la profondeur dont j’ai besoin pour « entrer » dans l’histoire.

5) Parmi les livres que tu as écrit, lequel est ton préféré ?

« La cicatrice du diable », parce que c’est mon roman le plus personnel. Je l’ai écrit à un moment de ma vie où il fallait que « ça sorte ».

6) Ton actu ?

Le tournage de la saison 2 de « Cherif », la série que j’ai co-créée, vient de se terminer. Diffusion sur France 2 à la fin de l’année. Je développe actuellement un projet audiovisuel qui s’annonce passionnant, j’en parlerai plus le moment venu, quand j’y serai autorisé. Et mon prochain roman est fini, là encore j’en dirai plus bientôt. Sans oublier la parution en poche, aux éditions Pocket, de mon roman "Des pas sous la cendre", le 13 novembre 2014.

 

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