Au cours d’une randonnée dans une partie sauvage de l’Islande, un voyageur, professeur de littérature classique, est sauvé de la noyade par un homme solitaire et bourru qui s’avère érudit dans le domaine de la Rome antique et peut communiquer aisément en latin. Au cours d’une conversation, le professeur évoque l’Ancien Testament, qu’il conseille à son hôte de lire. Échange épistolaire fructueux entre les deux hommes, par la suite, parfois vif et souvent passionnant à propos d’un texte fondamental, adulé ou détesté. L'attitude d'Israel aujourd'hui est liée directement à la nocivité que détectent dans l'Ancien Testament Sven et son interlocuteur.
Ce livre est noté par
@Steve Walk.
Cher Monsieur, je vous remercie pour votre analyse précise, libre et d'une honnêteté intellectuelle rare, ce qui manque tellement de nos jours. Votre enthousiasme m'encourage et votre jugement me convainc qu'être objectif et factuel, c'est choisir la voie la plus satisfaisante. J'ai moi aussi étudié dans un collège puis un lycée catholique (c'était le même établissement jésuite), et si je suis resté croyant jusqu'à mes études universitaires et si j'ai bénéficié - collège, lycée, faculté - d'un enseignement de grande qualité, j'ai été tôt effaré de la violence sectaire de l'Ancien Testament. Je me suis néanmoins efforcé d'analyser avec droiture le texte que Sven, mon personnage, découvre. Je vais vous lire, car vous me paraissez être un penseur stimulant.
Ce livre, à la lumière du conflit sanglant entre Israël et les Palestiniens, vient ici à son heure. Il permet de manière exceptionnelle de comprendre le lien entre le livre sacré des Hébreux, peuple sanguinaire, génocidaire, animé par un dieu abominable, et l'Etat d'Israël actuel. Il ne s'agit pas ici d'antisémitisme ou même de judéophobie - qui n'ont pas cours en l'occurrence, en tout cas dans l'esprit de l'auteur - mais de ce à quoi aboutissent le fanatisme et la prétention délirante de quelques membres d'un peuple parvenus au bout de leur parcours.
A lire de toute urgence.
Bonjour Michel, (@Michel Bugnon-Mordant),
Le Bien et le Mal, thème ô combien difficile que je m´efforce aussi d´aborder. Dans cet extrait, vous (Sven) semblez considérer que le Bien puisse exister en l´absence du Mal. Le Bien ne se nourrit-il pourtant pas du Mal pour le transcender? Indissociables, l´image d'Épinal biblique recèle malgré tout une certaine sagesse: en quittant son innocence pour devenir clairvoyant, c´est surtout l´Homme qui a créé le Mal (qui sans lui, n´existerait tout simplement pas). Si la douleur préexiste dans le monde animal, le "Mal" (comme la torture) - et donc le "Bien" en réaction - requiert une conscience pour émerger. Ce sont des créations purement humaines (sauf à reconnaitre au chat jouant avec la souris un niveau de conscience supérieur à ce que l´on veut bien leur accorder aujourd´hui), liées à une morale, une éthique. Une fois créé, notre destinée sera-t-elle de le répandre dans l´univers, ou de l´éradiquer par un effort (sur)humain (peut-être en nous éradiquant nous même, en provoquant l´Apocalypse)?
Plutôt que d´être une pâle réplique du divin, c´est bien plus l´Homme qui s´est façonné un Dieu à son image. L´idée d´un destin entrelacé d´une humanité imparfaite et d´un dieu en devenir devient tout d´un coup plus intéressante.
Je ne reviendrai pas sur les multiples aberrations du Dieu d´Abraham (que vous décrivez par le détail et que j´aborde aussi dans D.E.X) que seul un croyant compulsif peut justifier. Une fois admit que cette représentation puisse n´être qu´un miroir (à peine déformant) de notre propre condition, cette figure paternelle et royale devient beaucoup plus intéressante. Tout comme la volonté chrétienne de rupture. Alors, Jésus fils d´un père repentit (donc temporel et bien peu omnipotent)? Ou reniant ce mauvais père pour en adopter un meilleur, bien plus lumineux, mais dont le message fut incompris et mal retranscrit (volontairement)?
@Eric Brambilla
Merci Eric pour cet extrait très intéressant et qui ajoute un complément que j'apprécie à ma connaissance de l'AT et du christianisme dans son ensemble. Je ne vais pas manquer de prendre connaissance de votre roman.
Michel Bugnon-Mordant
Bonjour Michel, (@Michel Bugnon-Mordant)
Je viens de me rendre compte que vous traitez en profondeur de l´une des questions que j´aborde dans mon roman, D.E.X, et je vais de ce pas me plonger dans votre extrait.
En attendant, je vous laisse un petit dialogue (p399, relatif à une nouvelle religion techno-syncrétique), qui devrait vous interpeller (et n´hésitez pas à me corriger si j´ai dit une ânerie dans ce passage) :
— Leurs prêtres n’hésitent pas à raviver certaines interprétations manichéennes, aujourd’hui hérétiques. Les Albigeois rejetaient le démiurge obsessif de l’Ancien Testament, par trop capricieux et cruel pour être de la même nature que le dieu d’amour vénéré par le Christ et ses adeptes. Pour ne pas les choquer les judéo-chrétiens, cette nouvelle religion syncrétique ne va pas jusqu’à accuser le Créateur des prophètes judaïques d’être Satan, lui-même, comme le firent Marcion et Mani en leur temps. Pourtant, elle incite les croyants à s’éloigner du christianisme doctrinaire pour lui favoriser une lecture plus intérieure et personnelle des Écritures. La Nouvelle-Ur cherche à exacerber ces incohérences en redonnant à l’hérésie son sens premier, celui d’école de pensée.
— Matt veut parler du problème synoptique de l’Évangile selon Matthieu, la théorie des deux sources, et de la légitimité d’un élément clé ajouté par son auteur : "Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir la Loi".
Bras écartés, Sylvie imita le prophète pour le plus grand plaisir de Martin qui ne se retint pas de reluquer les formes protubérantes pressant son chemisier en satin clair. Matthew se dit que la mettre en croix serait la meilleure manière de damner un saint.
— Ses théologiens affirment que ce passage rajouté détruit l’unité du message christique. Ils reprennent l’intuition de Marcion confirmée par une analyse approfondie des textes pour en rejeter l’authenticité. Ils préfèrent voir dans l’Évangile de Marc et une source hypothétique, nommée Q, la paternité des versions plus tardives de Matthieu et de Luc.
@Monique Louicellier
Je suis très heureux, chère Monique, que vous ayez su placer mon texte dans son contexte exact et que le dialogue qu'il inclut vous ait interpellée. Personnellement je suis un chrétien politique et culturel, c'est-à-dire convaincu (et l'Histoire me le prouve) que le catholicisme est inséparable, en dépit de ses tares et de ses erreurs, de notre civilisation européenne, hélas en perdition, mais qui fut grande. Mais intellectuellement, je suis agnostique, ce qui veut dire que je ne sais pas s'il y a des dieux ou un dieu ou une force supérieure intelligente qui nous manipule. L'Evangile, pour moi, d'autre part, est un texte de morale et d'une certaine manière de philosophie auquel je peux sur bien des points souscrire. Il n'est pas impossible que j'écrive à son sujet quelque jour (bien qu'à mon âge ...). Ce n'est pas le cas de l'Ancien Testament, qui appartient à un peuple, les Hébreux, barbare, intolérant, criminel, et qui a malheureusement eu et a encore une influence néfaste, notamment sur les fous qui dirigent les Etats-Unis.
Merci pour votre intérêt, chère Monique..
Michel Bugnon-Mordant
@ Pascal.S
En dépit du ton un peu cavalier de votre interpellation (mais bien dans le ton général de notre époque), je vous remercie d'avoir reconnu la pertinence de mes propos. Quant à ce que vous désignez comme "trop tranché", je tiens à rappeler mon intention : mettre en scène un personnage vivant hors de notre civilisation en perdition, n'ayant eu aucune relation avec elle, n'ayant jamais entendu parler de la Bible. Mettez-vous à sa place : son jugement "tranché" et ne faisant "pas dans la mesure" n'est que le reflet de la violence et de la démesure du dieu de l'Ancien Testament. Sven ne "tape" d'ailleurs pas sur "Dieu" mais sur "un" dieu, celui de l'Ancien Testament, qui n'est pas le nôtre, à nous Européens authentiques. Un dieu de haine, de cruauté, de mensonge, de sadisme peut-il s'attendre à ce qu'on le décrive autrement qu'il n'est ? Juge-t-on un livre, par ailleurs, que l'on n'a pas lu de la première à la dernière page ?
Dis-donc dans ce récit, on peut dire que vous ne vous privez pas de taper sur Dieu. Vous l'accusez de tous les maux.... Pour vous que ce soit l'épisode de l'arbre du bien et du mal, celui de Abraham et Isaac ou Adam et Eve, vous accusez Dieu d'avoir autorisé le mal et même de l'avoir favorisé. Après vos arguments s'entendent et sont intéressants même si on peut trouver que vous ne faites pas dans la mesure et que vous avez un avis trop tranché!
@ Germain GUITARD
Je suis ravi d'avoir mérité vos compliments et vous en remercie. Un auteur a toujours besoin de reconnaissance et d'encouragement.
@ Agostini Francois-Xavier
Merci pour vos étoiles rassurantes et encourageantes.
Dieu ne s'enseigne pas. C'est une découverte individuel. Waoooo
@ Ange Gabriel
Cher Ange,
Votre appréciation m’a ravi par son originalité. J’aurais presque cru qu’un authentique habitant du Ciel s’adressait à moi. Vos paroles, quoi qu’il en soit, me sont une récompense pour mes efforts et un encouragement à poursuivre.
Bien à vous,
L'auteur
Bonjour Michel,
Je me permets de te tutoyer. Je m' octroie ce privilège car je sais que tu connais ma profession et mon grand âge. Age vénérable qui me permets de considérer Adam, Seth, Noé, Mathusalem et tant d' autres comme des amateurs. La lecture de ce livre m' a plongé dans un bain d' humanité, de culture, d' humour et de finesse. Dieu que votre érudition est immense. Seigneur je prie pour posséder un dixième des connaissances de Sven et de Michel. J' en perds mon latin ! pas vous ! Mon patron n' aime que l' Esprit Saint qu' il considère comme sain. Il pourrait donc m' affecter en Enfer, mais j' ai signé pour un CDI à vie auprès de lui et il n' a qu' une parole (enfin. j' espère). Ave Michel, Ave Sven.
Ange Gabriel.
Certains lecteurs ont cru voir dans mon livre un pamphlet. Voici le début d'explication que je livrais récemment à une revue suisse à laquelle j'avais accordé un entretien :
"MBM : La raison pour laquelle j’ai commis ce livre est double. D’une part, l’Ancien Testament a joué dans l’Histoire et joue encore un rôle fondamental ; il a donc un impact intellectuel mais également géopolitique majeur. D’autre part, cela faisait très longtemps que je m’interrogeais sur la manière dont pourrait réagir un lecteur n’ayant jamais entendu parler de l’Ancien Testament, ne connaissant rien à son environnement religieux, culturel, politique, historique. Je le voyais comme une sorte de Martien débarquant sur notre terre et à qui l’on mettrait entre les mains ce texte incroyable (au sens propre) et tonitruant. J’ai fini par céder à la tentation et j’ai inventé Sven, un érudit un peu particulier, abordant sans préjugé, avec une rectitude intellectuelle absolue, l’un des écrits les plus influents de tous les temps. M’étant glissé dans sa peau, je me suis tout naturellement laissé guider par lui.
IRO : Son objectivité, en tout cas, ne fait aucun doute. Mais son constat, disons-le, est des plus sévères.
MBM : Sven ne fait qu’exprimer une évidence : si tant est que les mots signifient encore quelque chose – mais face au déni global actuel de toute réalité, on peut en douter, – ce que décrit l’Ancien Testament est proprement horrifiant. Le dieu qui y est représenté et le peuple qui le sert enchaînent les abominations : mensonges, fourberies, sectarisme crasse, intolérance absolue, vanité himalayenne, mais surtout des massacres, encore des massacres, toujours des massacres. Le dieu des Hébreux, les chefs de ce peuple et ce peuple lui-même font en outre preuve d’une prétention dont on trouverait difficilement l’équivalent."
Je me suis simplement efforcé de rendre l'échange entre le professeur et l'érudit islandais aussi vivant et intéressant que possible.
Michel Bugnon-Mordant
@suzie fong
Je vous remercie pour votre commentaire. Je l'ai trouvé très constructif. Je vais lire quelques-unes de vos publications.
Michel Bugnon-Mordant