Le sapin
Choisir un arbre à feuilles caduques en plein hiver serait un choix pour le moins hasardeux. À cette saison, il vaut mieux se tourner vers un sujet sempervirent. Et parmi eux, le sapin a, reconnaissons-le, quelque chose en plus.
D’un seul trait, il dessine un triangle. Or le triangle n’est pas n’importe quelle figure : il renvoie au ternaire, dont la Tradition nous dit que un fait deux, deux fait trois, et trois fait tout. Du ternaire à la trinité, il n’y a qu’un pas — que l’histoire religieuse n’a pas hésité à franchir.
Le sapin est ternaire, donc. Il est aussi vert, couleur de la vie végétale, et son tronc droit, élancé, évoque sans peine l’axis mundi, ce pilier symbolique reliant la terre au ciel. Autrement dit, au moment précis de l’année où le soleil — source de toute vie — semble disparaître, le sapin était le candidat idéal pour symboliser la permanence.
Quant aux premières décorations de l’arbre, rappelons qu’il s’agissait de fruits. Manière supplémentaire d’évoquer la vie, certes, mais aussi, lorsqu’il s’agissait de pommes, la connaissance. Ainsi le sapin de Noël parle-t-il plusieurs langages à la fois : celui de la Tradition universelle, quand les hommes, aux quatre coins du monde, lisaient la nature avec les mêmes clés ; celui d’un certain paganisme ; puis, plus tard, ceux des traditions judaïque et chrétienne.
La bûche
Aujourd’hui, on la mange. Autrefois, on la brûlait.
Lors des anciennes fêtes du solstice d’hiver, au temps des nuits interminables (et sans électricité), deux choses étaient vitales : la chaleur et la lumière. La bûche répondait aux deux.
Il n’y a pas si longtemps encore — certains anciens l’ont connu enfants — on choisissait une belle bûche. À la tombée de la nuit, la famille sortait de la maison. Le père portait la bûche dans ses bras, et l’on faisait trois fois le tour de la demeure. Puis on entrait, on la déposait dans l’âtre, et tant qu’elle éclairait et chauffait, on parlait, on racontait, on chantait. Le feu tenait lieu de soleil de substitution, en attendant son retour.
La couronne de Noël
Encore un appel à la lumière. La couronne figure la roue solaire.
On la retrouve partout sur la planète, à des millénaires d’intervalle. Elle représente les quatre positions de la Grande Ourse aux solstices et aux équinoxes. Chez certains peuples, on l’appelle roue de la Vie, chez d’autres roue Médecine. Toujours la même idée : le cycle, le retour, la promesse que rien ne s’arrête vraiment.
L’étoile de Noël
Bien avant l’ère chrétienne, l’humanité avait remarqué qu’une étoile semblait immobile dans le ciel. Grande Faîtière pour les uns, étoile Polaire pour les autres, elle indiquait le centre, le point fixe autour duquel tout s’organise. Elle aussi renvoie à l’Axe du Monde.
Difficile, dès lors, de ne pas voir combien les symboles de Noël se répondent, se parlent et s’imbriquent.
Un détour par la Provence
En Provence, la tradition veut que le repas de Noël soit maigre : une soupe, et hop, à la messe. (Chez les bourgeois, toutefois, on avait parfois une lecture plus personnelle du mot « maigre ».)
Mais au retour, on découvre les trois nappes blanches, sur lesquelles trônent les treize desserts.
Treize, on comprend.
Trois nappes blanches ? Nous laisserons la question ouverte.
Les treize desserts commencent par les quatre mendiants — figue, amande, noix et raisin sec — destinés au nougat du pauvre, ou nougat des capucins. Viennent ensuite noisettes, pistaches et raisin muscat. Puis les jujubes (ou chichourles), les pommes, les poires, les oranges, parfois un melon précieusement conservé. Et enfin la pompe à l’huile. Ou les navettes à l’anis.
Elle est belle, la pompe à l’huile. Avec sa forme de soleil, sa couleur dorée donnée par l’huile et le zeste d’orange, elle annonce déjà le retour de la lumière. Et peut-être prévient-elle aussi que les rois approchent, qu’on les attendra bientôt avec une galette tout aussi solaire, garnie d’amandes — fruit de l’arbre qui fleurit le premier dans les campagnes de Provence, comme un clin d’œil au printemps à venir.
Les symboles de Noël : un rôle discret mais essentiel dans la littérature
Ainsi, dans la littérature, ces symboles ne sont pas toujours au premier plan. Ils n’agissent pas comme des personnages, mais comme des structures silencieuses.
Au fond, Noël n’a jamais cessé de parler la langue des saisons. Derrière les guirlandes et les desserts, il continue de raconter la même histoire. Noël n’invente rien.
Il assemble, il transmet, il superpose. Un arbre dressé comme un axe, une étoile immobile, une roue solaire, un feu domestiqué. Autant de signes anciens pour dire une chose très simple : le monde tient encore, la lumière revient toujours, et l’hiver n’a jamais eu le dernier mot.
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Merci pour ces précisions @Michel CANAL
Et joyeuses fêtes de fin d'année à vous aussi.
@Vanessa Michel, les trois nappes blanches pour : la Trinité (le Père, le Fils, et le Saint-Esprit).
Quant aux 13 desserts, ils représentent la Cène, le Christ et ses 12 Apôtres.
Joyeux Noël et bon repas de fête. MC
Je ne connaissais pas la tradition des trois nappes blanches.
https://www.francebleu.fr/emissions/histoires-et-recettes/la-tradition-de-noel-des-trois-nappes-8583478
Merci pour cet article ! Bon réveillon.
Merci, @monBestSeller, pour cet article qui nous rappelle et nous éclaire sur ces traditions.
Joyeux Noël à toute l'équipe qui se dévoue pour la communauté.
MC