Océane aux noces

Flux et reflux délicieux pour Océane, nouvelle de Saint-Bleyras pour l'appel à l'écriture monBestSeller Nuit de noces

La belle Océane avait été conviée, comme de juste, aux noces de sa grande sœur Nigelle qui épousait son promis devenant mari, le beau Georges (comme on disait dans la cour du lycée de jeunes filles et de jeunes hommes).

Mairie, église ; collation ; bal et banquet, banquet puis bal : les noces firent la noce, comme il se doit.

De sorte que, parmi les invités, Eros et Cupidon souventes fois s’activèrent, hors du cadre officiel et rituel de l’union des corps, des âmes et des cœurs sexués les uns par les autres attirés.

Oui, parmi les gens de la noce, Eros et Cupidon passèrent avec entrain et en catimini aux « travaux pratiques », comme dit ma voisine chaque jeudi soir quand je viens la voir alors que ma femme est à son club de poterie.

Mais, bien sûr, le soir tombé, la nuit vint !

Et pas n’importe quelle nuit. La nuit de noces de la belle Nigelle et du beau Georges.

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Les jeunes mariés s’éclipsèrent à minuit pour interpréter leur propre version d’ « Eros et Cupidon », opéra amoureux et voluptueux. L’événement musical et nuptial, privé, serait donné en dessus de la bruyante salle de bal, dans la chambre strictement réservée à cet effet.

Cependant, une jeune mélomane, intensément curieuse d’entendre cet opéra au nom formidable, monta en cachette à l’étage pour épier le chant des amants amoureux : c’était la belle Océane !

Assise sur une marche d’escalier proche de la chambre nuptiale à la porte à peine entrebâillée,  elle tendit l’oreille, du temps que le beau Georges tendait son arbalète et l’activait en cadence avec la belle Nigelle qui chantait en écho le plus beau des chants d’amour sur le mode « travaux pratiques ».

La candide et réceptive Océane, sans même s’en rendre compte, se trouva bientôt emportée, à distance, dans ce rythme lancinant, orchestré par les gémissements de sa sœur Nigelle et par ceux, parfois proches du grognement, du beau Georges. La literie coopérait avec ardeur de ses grincements et couinements approbateurs.

Conjointement, le fin bruissement velouté des caresses que s’échangeaient les jeunes mariés, la tendre musique de leurs mots doux, sublimaient le nuptial opéra et, peu à peu, la belle Océane se trouva elle-même envahie, transportée, jusqu’aux rivages de l’extase.

Puis, en même temps que les deux amants, subjuguée, transfigurée, elle plongea d’un coup, avec ivresse, au sein même de l’orgasme charnel et musical.

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La belle Nigelle, qui avait l’oreille plutôt exercée, s’étonna bien un peu d’entendre, mêlée au sublime contre-ut éructé par le beau Georges, une voix féminine autre que la sienne propre et qui donnait un mi naturel du plus bel effet. Puis, elle-même délivra enfin un sol aigu limpide et juste qui vint former un accord majeur parfait avec les deux autres notes, et tout étonnement fut oublié, tout s’effaça devant l’harmonie vocale saisissante et puissante qui s’emparait d’elle. L’extase, totale, se répandait et s’épanouissait en toute beauté dans le corps et dans l’âme de chacun des trois serviteurs chantants de l’amour, réunis par celui-ci.

Telle fut la nuit de noces ingénument partagée par la belle Océane.

Cette histoire fut par la suite racontée, sous le nom d’Océane aux noces. Mais quelque malentendant, féru de Victor Hugo, lui donna plus tard un titre apocryphe emprunté au poète, qui le tenait lui-même de l’antique Virgile : Oceano nox !

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