Le jour du réveillon du Noël de mes seize ans, une tempête de neige se déclara. Des flocons tourbillonnant dans le vent. Je les vis d’abord par la fenêtre de la cuisine de chez mes grands-parents, alors qu’en famille, je préparais les toasts pour le réveillon. L’air embaumait les gâteaux fraîchement sortis du four.
La neige de Noël est rare. Elle n’existe pas pour être simplement regardée derrière une vitre. La neige de Noël se sent, se touche, se regarde. Elle se vit. Sinon, c’est du gâchis. Avec des thermos et nos vêtements les plus couvrants, mon grand-père, mes oncles et moi quittâmes la chaleur du foyer et nous lançâmes dans la tourmente désormais ralentie. Une couche de neige épaisse recouvrait la campagne, les arbres scintillaient à chaque mouvement, et mes bottes s’enfonçaient à chaque pas en crissant. Arrivant dans notre pré, l’on sortit les boissons pour nous réchauffer et reprendre des forces. Les forces reprises, nous chahutâmes dans la blancheur, se lançant des boules de neige. Puis, la tempête redoubla, et l’on rentra tandis que le silence tombait en même temps que la nuit.
Le soir, c’était le réveillon, dans la salle à manger de mes grands-parents. Mes oncles et tantes, mes cousins, le sapin illuminé, les chants qui résonnaient. La maison était couverte de décorations, et des guirlandes étaient accrochées partout sur les poutres de bois du plafond. Au pied du sapin, nous faisions toujours une crèche, et c’était ce que je préférais faire. J’adorais sculpter le terrain et tout y placer, les personnages de la nativité mais aussi des animaux, beaucoup d’animaux. Comme pour célébrer la vie qui continuait, même au cœur de l’hiver. Depuis toujours, j’aimais ce moment de réveillon, où l’ambiance joyeuse ne devenait jamais trop bruyante, où les rires de chacun résonnait. Les cousins prenaient des nouvelles les uns des autres, mes jeunes frères, au comble de l’excitation, attendaient l’arrivée du Père Noël en le guettant par la fenêtre, dans la rue enneigée.
J'aimais bien voir les sourires des adultes et les yeux brillants des enfants. Il y avait quelque chose de magique dans l’air.
Mais aujourd’hui, nous avons vieilli, les enfants ont grandi. Et d’autres personnes sont parties. Les trous des punaises dans les poutres de bois sont toujours là, mais aucune guirlande n’y est plus accrochée. Les réveillons ont changé.
Et il n’y a plus jamais eu de Noël blanc.
Alors parfois, je me dis que Noël, c’est comme la neige qui est tombée cette année-là. Elle passe et s’échappe sans que l’on puisse rien y faire. Chaque Noël est comme un manteau de neige vierge sur laquelle nos pas écrivent des histoires qui s’effacent et ne reviennent pas.
Aujourd’hui, je ressens parfois dans mon cœur une langueur qui n'était pas là avant.
Mais j'aime toujours les odeurs de sapin et de cannelle, les bredele chauds et les décorations… Les Noëls de mon enfance ont disparu, mais à partir de leurs restes, de nouvelles traditions émergent. C'est avec ma petite sœur, désormais, que s'écrivent de nouvelles pages. J’aime que sur ces anciennes bases, de nouvelles traditions, tout aussi belles, se créent. Aujourd’hui, j’aime Noël différemment.
Et peut-être même qu’un jour -qui sait ? Il y aura, à nouveau, un magnifique Noël enneigé…
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…
Votre texte est un souffle de nostalgie et d'espoir. La neige, si rare et éphémère, devient un symbole parfait des souvenirs de Noël : précieux, uniques, et pourtant fugaces.
Cette lumière d'espoir, portée par l'idée d'un futur Noël blanc, réchauffe le cœur.
Merci pour ce joli moment de douceur et de réflexion.
@Fernand Fallou
Merci ! Non, en effet, je ne vois pas la nostalgie comme quelque chose de fondamentalement négatif. Pour moi, à partir du moment où l'on devient adulte, la nostalgie devient une part intégrante des fêtes, à la condition bien sûr que l'on en ait de beaux souvenirs, ce qui est déjà une chance. Et donc, je pense que parfois, ce n'est pas mal d'être reconnaissant envers sa nostalgie.
@Christophe M
Merci pour cette belle description. Bien trouvé!
@Phillechat 2 :
Merci !
@Zoé Florent :
Oui, j'ai honte, franchement, comment j'ai pu ne pas voir ces erreurs avant d'envoyer le texte ? J'avoue que je l'ai moins relu que je ne le fais pour mes romans ou autres longs textes car je voulais garder cet aspect un peu "brut", l'émotion que je ressentais sur le moment, et j'avais peur que tout ça ne disparaisse si je le travaillais trop, mais ça m'a finalement un peu piégée. Mais, malgré tout, merci pour vos encouragements et conseils, et très bonnes fêtes de fin d'année à vous aussi !
@Prescilia Marande "se lançant" au lieu de "nous"... "résonnait" au singulier... quelques fautes donc, et une plume un peu scolaire à mon goût... Mais vous paraissez très jeune et avez le temps de vous démarquer, ce dont je ne doute pas ;-).
À présent, n'oubliez pas qu'il dépend que de vous de rendre cette date festive à votre tour, avec ou sans neige, et de recréer cette magie que savaient inventer vos aïeux.
Joyeuses fêtes de fin d'année, chère Prescilia,
Michèle
Magique et poétique !
Un texte comme du chocolat noir : pure, puissant et fondant à la fois, un brin d'amertume mais une note de plaisir à la fin.
@Prescilia Marande
La nostalgie est un sentiment de plaisir furtif bien agréable. Oui, je sais que parfois, il peut être négatif, mais dans ce texte, ce n’est pas le cas.
Merci de l’avoir partagé.
Bravo !
FF