J’ai découvert l’œuvre de René Char de curieuse façon, assez tardivement. On m’avait poliment expliqué que ma formation scientifique ne correspondait pas à ‘’la ligne éditoriale de la maison’’, et ne m’autorisait pas à prétendre m’asseoir sur les rayons des librairies parmi les littéraires de renom.
Et l’on fit bien ! (Chaque jour, depuis, je remercie le ciel de m’avoir évité le pire).
Vivre d’abord ! Ensuite, on peut écrire, peindre ou chanter, faire le clown ou, à la rigueur, entrer en politique.
Car le destin me donna l’ordre, peu de temps après, de me rendre au Pérou pour y faire voler des avions de guerre. Dans ce pays fabuleux d’un continent encore mystérieux, où tout habitant est un poète qui s’ignore, chacun dans son genre, je fus confronté aux énigmes de René Char en même temps que je me familiarisais avec la culture Mochica pré-incaïque des provinces du nord et celle des artistes des provinces du sud qui avaient dessiné les hiéroglyphes de Nazca.
Je revenais en France tous les deux ans, où j’avais un cousin, grand littéraire et doyen d’Université, jeune fou sympathique qui écrivait en rafales des poèmes, des pensées profondes et même, des opéras.
C’est lui qui me posa la question à brûle-pourpoint, et le sourire en coin, certain de me piéger : « Connais-tu René Char ? »
Comme je restai coi, indigne analphabète refusé pour la gloire des étagères de libraires, il se leva et débita un chapelet des fameuses citations de René Char qui semblent obscures au premier abord mais qui, ensuite, aveuglent de leur lumière et de leur vérité. Dans les brumes d’alcool de poire, et les fumées de trop de cigarettes, je lui avouai que je n’y entendais rien.
— C’est un surréaliste qui a mal tourné parce que, pendant la guerre, il est entré dans la Résistance…
Puis, visiblement content de lui, heureux de m’avoir écrasé de honte, il me tendit un livre échappé du désordre de sa bibliothèque :
— Emmène-le avec toi dans ton désert de sauvages !
(Comme beaucoup de fins lettrés de l’époque, il ne savait pas très bien où se situait exactement le pays de Vargas Llosa).
C’était : LES MATINAUX. Feuilletant jusqu’à la fin, et arrivant à « ROUGEUR DES MATINAUX », il m’indiqua le numéro III :
— Tiens ! Ca c’est pour toi ! Et fais-en bon usage…
Et c’est ainsi que j’ai découvert les deux petites lignes qui m’ont servi de guide et de doctrine pendant toute ma vie.
‘’ Impose ta chance, serre ton bonheur, et va vers ton risque
A te regarder, Ils s’habitueront. ‘’
Car ce poète n’habite pas en haut de la montagne, à l’abri des indiscrets, quand il vous parle d’homme à homme, il vous tutoie.
Errant parmi les incendies de cannes à sucre, à Pomalca, guettant les retours de pêche des balsas de totora, à Pimentel, je m’inculquais cette sentence magique avec la conscience d’aller dans le bon chemin. Celui des Transparents.
Ne me demandez pas ce qu’elle signifie. N’imitez pas les savants, ne brisez pas l’aurore du poète : Je me suis contenté de suivre les conseils de ce conspirateur.
Car, ‘’ Un homme sans défaut est une montagne sans crevasses. Il ne m’intéresse pas ‘’ (Feuillets d’Hypnos, dans Fureur et Mystère)
Il était bien gentil, mon cousin, mais moi, l’analphabète scientifique, qui contemplais l’océan du sommet de la « Huaca del Dragon », qui tentais de déchiffrer les frises de pélicans taillés dans la boue séchée érodée par les vents salés des tempêtes, comment pouvais-je gravir les pentes multiples de ce poète qu’il m’avait fourré dans la poche pour le voyage ?
Il faut être patient et modeste pour prétendre s’introduire à ciel ouvert dans les grottes ombrées de René Char.
Déjà, quand il était petit et ne répondait pas aux appels de la famille qui le cherchait, son père s’exclamait : « Ce petit, pour le voir, il faut regarder en haut ! » (Aqueù pichot, per lou veire, faù regarda adaù). Il se cachait dans la rocaille des terres provençales.
Il ne faut pas aller vers René Char comme on va à Victor Hugo ou Baudelaire, et attendre le ravissement. Ni comme on va à Rimbaud ou Verlaine, et craindre l’effroi ou l’éblouissement. Il faut rester stoïque et s’aventurer sans peur dans la pluie giboyeuse : « Donne toujours plus que tu ne peux reprendre. Et oublie. Telle est la voie sacrée »
Savait-il, mon joyeux cousin, buveur et fumeur invétéré, adorable conteur de fééries fumeuses, qu’il m’avait fourni la clé d’un poète pour ouvrir la serrure de ma vie ?
Savait-il qu’un jour, j’aurais à survoler les lignes de Nazca par soleil couchant pour distinguer les ombres, et que, de mon petit avion fragile, j’aurais à découvrir ces bêtes formidables endormies sur le sable depuis plusieurs siècles ? La Arana, le Picaflor, le Parihuana, le Chancato, le Colibri et la Grenouille, la grande Spirale double, que des mains de géants aux intentions insondables avaient laissés pour traces de leur passage entre la Cordillère et la presqu’île de Paracas marquée d’un candélabre destiné à guider le navigateur.
Non, il ne savait pas, et ne l’a jamais su, qu’il m’avait fourni les armes pour défendre mon avenir :
« Avec mes dents, J’ai pris la vie sur le couteau de ma jeunesse
Avec mes lèvres aujourd’hui, Avec mes lèvres seulement… »
(Le Nu Perdu. Jeu muet)
En ce temps-là, juste avant la terrible blessure qui entailla le visage de la France, ma génération possédait un héros en littérature : Albert Camus, ce petit pied-noir, dont la mère illettrée n’a jamais lu une ligne de son fils, qui partit de son bled perdu, orphelin de son père tué quand il avait un an, pour rejoindre Stockholm y prononcer un discours de Prix Nobel. A nous, écoliers encore, il avait offert L’Etranger et La Peste.
Les deux compères se connaissaient et s’étaient liés d’amitié, s’écrivaient et se visitaient. L’un foulait les prairies sur les bords de la Sorgue, l’autre avait parcouru les rivages dans les senteurs de Tipasa. On les voit tous les deux, à l’Isle-sur-la-Sorgue : L’un, grande et dure carcasse aux jambes poilues et cigarette au bec au milieu d’un visage massif taillé à la serpe ; L’autre, tout de blanc vêtu et se grattant la tête, aux poumons menacés par la tuberculose, journaliste à "Combat", versé dans le théâtre.
C’est Camus qui résume le mieux : « Du soleil, la poésie de Char a l’obscurité fugitive ». C’est Char qui salue le lauréat du Prix Nobel : « Ici, sur les champs malheureux, une charrue fervente ouvre la terre, malgré les défenses et malgré la peur ».
J’ai inscrit ces deux hommes sur mon tableau d’honneur, où ils sont encore pour consoler l’analphabète scientifique.
Dans La Postérité du Soleil, sur des photos d’Henriette Grindat datant de sa visite à René Char durant l’été 1950, Albert Camus se fit le chantre des paysages intimes du poète autour de l’Isle-sur-la-Sorgue. Et celui-ci lui consacra un poème d’introduction : « De moment en moment », où René Char nous prévenait déjà : « Le monde, de nos jours, est hostile aux Transparents »
C’est encore vrai, mais « Au plus fort de l’orage, il y a toujours un oiseau pour nous rassurer. C’est l’oiseau inconnu. Il chante avant de s’envoler. »
Au fil de vos lectures, auteurs de tous bords, vous trouverez la méthode de René Char : « Le poète ne peut pas longtemps demeurer dans la stratosphère du Verbe. Il doit se lover dans de nouvelles larmes, et pousser plus avant dans son ordre. »
Dans « Les voisinages de Van Gogh » (1985), René Char m’a aidé une dernière fois : « Ma solitude, où tiens-tu mon désir enfoui ? »
Gérard BOSSY
Bibliographie de René Char :
Le Marteau sans maître, 1934
Placard pour un chemin des écoliers, 1937
Dehors la nuit est gouvernée, 1938
Feuillets d'Hypnos, 1946
Fureur et mystère, 1948
La Parole en archipel, 1962
la Nuit talismanique, 1972
Chants de la Balandrane, 1977
Et pour en savoir plus sur René Char
grâce à la collaboration d'Élizabeth M.AÎNÉ-DUROC
En apprendre plus sur René Char :
René Émile Char voit le jour au tout début du siècle dernier, en 1907, un peu avant l'été : le 14 Juin. Dernier né d'une fratrie de quatre enfants, sa situation familiale est peu commune. Son père, Joseph Émile, mandaté maire de L'isle-sur-la-Sorgue à partir de 1905 et nommé administrateur délégué des Plâtrières de Vaucluse l'année même de la naissance de son cadet, avait en effet épousé, en premières noces, la sœur de celle qui deviendrait pourtant la mère de ses enfants à la suite du décès de sa première femme.
De cet illustre père jouissant d'une certaine notoriété et qui offrait à sa famille un train de vie aisé, le jeune René sera très proche ; malheureusement, Jospeh Émile Char décède en 1918 des suites d'un cancer. La famille entre alors en détresse et subit de plein fouet l'apprentissage d'une vie quotidienne devenue précaire. Si des liens intimes unissaient René et son père, s'il tenait à ses deux sœurs, à sa grand-mère et à sa marraine, nous rapporte-t-on, en revanche il n'entrait guère dans les affections de sa propre mère : sa vie va changer désormais.
René Char entre au lycée Mistral d'Avignon l'année de la mort de son père. Il a onze ans, se bâtit déjà un corps de géant, pratique le rugby avec fougue, et développe des amitiés durables, avec Jean Garcin, puis plus tard, avec Louis Curel, membre du parti communiste. Autant de personnages authentiques et hauts en couleur, qui viendront à figurer dans les écrits du poète rebelle. Louis Curel, par exemple, deviendra Auguste Abondance dans 'Le Soleil des eaux'.
De 1923, -date à laquelle il quittera son lycée à la suite d'un accrochage qui l'aura opposé à un professeur, lequel se serait mêlé de se moquer de ses tout premiers vers-, à 1929, René Char se cherche. Il se rend en Tunisie, pays dans lequel son père avait initié une petite plâtrerie, mais il en revient vite. Il entreprend des études de commerce qui ne parviennent pas à le passionner, se fait embaucher dans une maison d'expédition de fruits et légumes et, courant 1927, effectue à Nîmes son service militaire. Durant toutes ces années le poète lit, beaucoup, passant de Plutarque à Racine, de Rimbaud à Mallarmé. À Nîmes il rédige sa première critique littéraire ; et, en 1928 enfin, vient, aux éditions de la revue, la publication d'un premier recueil : 'Les Cloches sur le cœur'.
En 1929, René Char fonde une revue, qui ne connaîtra que trois numéros mais lui donne l'occasion de se faire un nom. Il y publie une nouvelle, réputée autobiographique, 'Acquis par la conscience'. Il fera bientôt la connaissance d'un personnage qu'il côtoiera sa vie durant : le poète Paul Éluard, à qui il avait envoyé un exemplaire de son second recueil publié, 'Arsenal'. Paul Éluard lui rend personnellement visite et l'invite à se rendre à Paris où, en fin d'année, René fait la connaissance de Louis Aragon et de André Breton (pour ne citer qu'eux). Il adhère dès lors au mouvement du surréalisme littéraire, mouvement dont il sera trésorier tout une année durant.
En 1930 -le 14 février- le groupe des surréalistes saccage un bar à Paris, une 'bataille' mémorable au cours de laquelle René sera blessé. Voilà qui ne l'empêche pas de vivre une existence bien remplie, sans lois ni interdits, accompagné toujours de son cher Paul Éluard. Jusqu'en 1934, période à laquelle il décidera de se désolidariser du surréalisme, « mort du sectarisme imbécile de ses adeptes », René Char accumule les voyages, les rencontres, les défis, se découvrant de nouvelles amitiés et se montrant fidèle aux anciennes. En octobre 1932, il épouse Georgette Goldstein rencontrée lors d'un voyage en Espagne.
En 1937, victime d'une septicémie qui lui vaut un an de convalescence, René Char approfondit ses lectures, se forge de nouvelles amitiés qui incluent des artistes peintres, dont le travail et les œuvres l'inspirent. En 1938, il tombe éperdument amoureux d'une artiste peintre d'origine suédoise, Greta Knutson, aux côtés de laquelle il découvre le romantisme allemand. Mais vient la guerre. En 1939, Char est mobilisé.
C'est alors, à l'évidence, que l'existence de René Char prend un tournant. Pendant l'occupation, il entre dans la Résistance. Mais cette même prise de position est une torture pour l'homme profond et absolu qu'est René Char. Lors même qu'il doit agir les armes à la main, (il est nommé responsable d'une section atterrissage-parachutage et prend son QG dans les Basses-Alpes), il s'interroge cruellement sur le sens et la valeur de ses actions. Avec la dernière énergie il combat le nazisme et réfute toutes ses thèses ; il se refusera à toute publication le temps que durera la guerre. Il écrit cependant, les fameux 'Feuillets d'Hypnos', les 'Billets à Francis Curel', qui sont, l'un comme l'autre, sous leur apparence de notes éparses, des ouvrages construits et volontaires au cours des pages desquels Char se livre, corps et âme, pour faire connaître les impressions que lui inspirent la terrible guerre et la terrible résistance : « école de douleur et d'espérance », écrira-t-il, parlant de cette dernière.
L'après-guerre est également douloureux pour René Char qui n'a pas confiance dans les actions entreprises pour le relèvement de la France. L'écrivain qu'il est, le résistant qu'il est devenu, entretiendra une amitié sincère et solide avec son confrère contemporain Albert Camus et partagera avec lui, dit-on, un point de vue pessimiste quant à l'avenir du pays. En témoignent les écrits des deux auteurs. Cependant, René Char tâche de s'ouvrir à de nouvelles perspectives, le théâtre et le cinéma l'intéressent, il connaîtra désillusion et malheur dans ces domaines, mais on lui doit en partie la création du célèbre Festival d'Avignon initié en 1947. Quoiqu'il en soit, c'est à cette époque que les spécialistes de René Char situent la maturité poétique de l'auteur qui publie énormément 'Les Matinaux', 'La Bibliothèque est en Feu', etc.
La publication, en 1971, du 'Cahier de l'Herne', et, en 1983, celle de ses 'Œuvres Complètes' dans la Bibliothèque de la Pléiade, consacrent René Char, sa figure et ses écrits et lui ouvrent la voie de la postérité. Dans les deux dernières années de sa vie, l'auteur qu'il est, engagé par tout refus d'engagement, prolixe et passionné, publie encore des ouvrages d'importance, tel 'La Nuit talismanique qui brillait dans son cercle'. En 1987, il se marie avec Marie-Claude de Saint-Seine mais peu après, le 19 février 1988, terrassé par une attaque cardiaque, René Char meurt à Paris à l'âge de quatre-vingt ans.
> En 1917, alors qu'il n'est âgé que de dix ans, René Char est mordu par un chien enragé. Il sera l'un des premiers à bénéficier du vaccin mis au point par Louis Pasteur.
> René Char est également connu sous un autre nom : celui de 'Capitaine Alexandre'. Il ne s'agit pas là d'un nom de plume adopté par l'auteur, mais bien du pseudonyme sous lequel il officiait du temps où il faisait partie de la Résistance et qui lui est resté par la suite.
> René Char avait un physique de colosse ! Massif et musclé, le visage semblant taillé, sinon au couteau, du moins au burin, il mesurait 1 mètre 92 !
> Les recueils poétiques, bien entendu. On peut choisir un de ceux qui sont cités dans cet article de biographie. À savoir, certains recueils sont en fait des compilations : 'Fureur et Mystère' paru en 1948 regroupe plusieurs livres dont les 'Feuillets d'Hypnos'.
> Les Œuvres Complètes, Bibliothèque de la Pléiade (édition revue en 1995, préfacée par Jean Roudaut).
> 'Correspondance 1946-1959', un ouvrage qui regroupe les échanges épistolaires qui ont eu lieu entre René Char et Albert Camus dans la même période. L'ouvrage a paru en 2007 aux éditions Gallimard.
Élizabeth M. AÎNÉ-DUROC.
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…
@BOSSY Votre cousin vous a fait découvrir René Char qui vous a bouleversé aussi, je vous remercie infiniment cher Gérard de nous passer le relai. Lors de ma prochaine visite à la médiathèque je saurai où diriger mes pas. Belle année à vous. Fort amicalement. Fanny
Merci à tous et à toutes, et à qui de droit, d'avoir rendu à cette page la bonne couleur des Transparents.
@Elizabeth M.AÏNE-DUROC. Concluons: Votre travail est bon, dieu sait s'il est ingrat. J'aurais été bien embarrassé de résumer une biographie de ce poète que j'ai pourtant poursuivi dans tous les recoins.Persévèrez dans cette tâche indispensable pour compléter une chronique forcément trop partielle pour éclairer un grand Classique, quel qu'il soit. A fortiori quand il figure parmi ceux dont l'accès n'est pas évident et pas aussi aisé que celui qui conduit aux auteurs répétés maintes fois à l'Ecole. Par ailleurs, la poésie est un domaine que n'aborde pas tout le monde avec enthousiasme. Et puis, c'est une loi constante, dès que vous écrivez quelque chose, vous êtes soumis à critique, et c'est bien ainsi. Il faut parfois sourire, parfois pleurer, toujours subir. C'est à la fois une croix et un bonheur. Je ne croyais pas déclencher une telle bataille de polochons ! Courage ! Bien à vous.
Très cher Hubert, Je n'étais pas disponible dans la journée d'hier, je reviens visiter cette page aujourd'hui, et je découvre qu'elle a été le théâtre d'un déchirement ! Aussi, j'espère de tout cœur que vous recevrez ce message. Vous avez tout à fait raison : elles peuvent être bien rébarbatives, ces annotations documentaires, surtout quand elles viennent à la suite d'un texte aussi époustouflant que l'est celui de notre cher @BOSSY... Si vous avez jeté un coup d'œil à mon commentaire, en bas de cette page, vous aurez découvert que je suis la première gênée, -et honorée-, d'avoir des mots à ajouter à la suite de ce flamboyant article... Quand on m'a proposé d'assurer l'animation de cette rubrique des Classiques mBS, il était question que j'en assume la partie didactique qui doit venir à la suite des articles inspirés des Auteurs. Tâche dont l'idée me passionnait, mais qui n'a rien de très facile. Devoir écrire un texte sans vraiment de poésie pour parler des poètes et des écrivains, sans pouvoir leur demander leur avis, c'est assez ingrat ! Je vous rejoins tout-à-fait : il n'y a pas de génie là-dedans, et mes pauvres biographies me semblent navrantes à moi-même. Je tâche de les rédiger avec, à la pensée, ceux d'entre les Lecteurs qui souhaiteraient obtenir ces renseignements, et qui, en plus, en apprendraient bien plus en se rendant sur Wikipédia ! Cela dit, ces contenus aident au référencement du site de monBestSeller, ils le rendent un peu plus visible et accessible, alors, je vais de l'avant... Je suis navrée d'apprendre votre décision de quitter mBS, nous avons eu quelques échanges par le passé, que j'ai beaucoup appréciés, et je n'ai pas encore eu l'occasion d'aller me régaler de la lecture de vos ouvrages ! Je ne sais pas si vous aurez encore l'envie ou la motivation suffisantes pour cliquer sur ce lien, et survoler d'un coup d'œil un article qui est passé un peu inaperçu, et dans lequel j'expliquais quelle est la raison d'être de ces articles de la rubrique des Classiques. http://www.monbestseller.com/actualites-litteraire/6745-les-classiques-e... Vous y découvririez la chance qui est laissée à tous les Auteurs de s'exprimer dans cette rubrique, et qui sait si, un jour, nous n'aurions pas eu l'occasion de collaborer autour d'un de vos auteurs favoris. J'aurais alors produit tous mes efforts pour ne pas assortir votre texte d'éléments biographiques ennuyeux. Si vous prenez la décision de ne pas quitter mBS, et si vous relisez un jour encore un article de cette rubrique, je vous le dis : jouez à saute-mouton ! Passez la partie didactique, et rendez-vous directement section 'commentaires', où vos collaborations étaient jusqu'à présent aussi souhaitées qu'appréciées à leur juste valeur. Je renouvelle à Gérard BOSSY mes félicitations pour cet article de cœur, profond et merveilleux. Amicalement et bien à vous, Élizabeth. @Hubert-P LETIERS, @BOSSY, @monbestseller
@Pierrick Blin-Paulin @BOSSY
Comme vous le dites, c'était il y a 40-45 ans :) et il y a 45 ans lorsque j'étais en primaire on nous faisait lire M. Carême et quelques autres probablement :)
Et je suis d'accord, les gens intéressés connaissent Char et d'autres, mais le "grand public" d'aujourd'hui (dont je fais partie quand il s'agit de poésie) connnait surtout les noms de Baudelaire, Rimbaud, Verlaine, un peu Aragon grâce à Ferrat.
@BOSSY
Que vous dire sinon que votre article est magnifique. J'ai découvert René Char avec un poème tiré de FUREUR ET MYSTERE. J'étais fasciné par ce texte. J'avais 17 ans. 45 ans plus tard, Char est toujours près de moi. Voici donc EVADNE:
L’été et notre vie étions d’un seul tenant
La campagne mangeait la couleur de ta jupe odorante
Avidité et contrainte s’étaient réconciliées
Le château de Maubec s’enfonçait dans l’argile
Bientôt s’effondrerait le roulis de sa lyre
La violence des plantes nous faisait vaciller
Un corbeau rameur sombre déviant de l’escadre
Sur le muet silex de midi écartelé
Accompagnait notre entente aux mouvements tendres
La faucille partout devait se reposer
Notre rareté commençait un règne
(Le vent insomnieux qui nous ride la paupière
En tournant chaque nuit la page consentie
Veut que chaque part de toi que je retienne
Soit étendue à un pays d’âge affamé et de larmier géant).
C’était au début d’adorables années
La terre nous aimait un peu je me souviens.
@Robert Dorazi. Détrompez-vous. Il existe nombre de personnes intéressées par la poésie qui connaissent maintenant René Char pratiquement classé dans les " Classiques ". L'anecdote que je raconte date de plus de 40 ans, et il est vrai qu'à cette époque nous étions nombreux à rester bouche bée. Les quelques citations que j' ai faites sont reconnues par beaucoup ( quelques fois approximativement, c'est vrai ). Il en est de la poésie, comme de la musique classique, c'est devenu un peu affaire de spécialistes qui dégustent dans leur coin sans avoir recours aux souffreteuses médias actuelles. Ce n'est pas pour rien que nombre de nos enfants sortent de l'école sans savoir lire et écrire. Alors, leur demander une citation ou un poème de René Char...Beaucoup n'en sauront pas plus sur Baudelaire ou Verlaine, sauf s'il figurent au répertoire d'un chanteur à la mode (encore que Brassens, Brel ou Léo Ferré n'ont pas faits beaucoup de petits...)
Il en va malheureusement de certains poètes comme de certains musiciens, ils doivent en effet être redécouverts. Si vous demandez le nom d'un violoniste à un quidam qui n'est pas de la partie, il/elle vous répondra probablement Menuhin ou (horreur :) ) André Rieux. Pourtant Heifetz, Oistrakh ou Milstein ont leur place au firmament. Parfois j'entends le nom de Carême et je pense "mais oui! j'ai appris un de ses poèmes quand j'étais en maternelle...!"
C'est la même chose pour R. Char. Je défie quiconque de me citer de mémoire ne serait-ce que le début d'un de ses poèmes ou même un titre.
@BOSSY
Je vous prie de m’en excuser Gérard car vous avez parfaitement raison. Cela me donne l’opportunité de vous dire combien j’apprécie votre papier qui est exactement l’esprit que nous espérions de cette rubrique. Comment un auteur universel peut coïncider avec notre destin ou l’influencer de façon particulière et changer le sens de notre vie, imperceptiblement.
@monbestseller @Hubert-P Letiers @jezzabel @Elisabeth M.AÏNE DUROC.A mon avis, une page réservée à la célébration d'un poète ne devrait pas être le lieu de pugilats et autres règlements de compte. Tout commentaire hors sujet devrait être supprimé. MBS nous offre sa plateforme et reste maître à bord. Hubert, vous étiez un homme raisonnable). Elisabeth, vous avez bien travaillé, votre biographie est assez complète et ce n'est pas facile à faire en quelques paragraphes
.
Si l' on perd de vue ses querelles
On échange aussi sa maison
Contre un rocher dont l horizon
S'égoutte sous une fougère
@jezzabel
Il y a heureusement de grands auteurs chez monBestSeller qui n'ont pas besoin qu'on leur remémore les grands écrivains d'hier, preuve de la qualité de notre recrutement intransigeant. Nous cherchons à "virer" le fabricant de chapeau, mais il nous faut une remplaçant(e) qui me semble toute désignée...
Et Bravo à cet article personnel qui éclaire sous d'autres angles des vérités que nous connaissons tous par coeur. Bien évidemment !
Merci à vous @Michel Canal, si cela a provoqué l'éveil de Michel, toutes proportions gardées. Ce site a aussi pour objet de rappeler chacun de nous à la plus grande humilité. Et vous prouvez que le monde, aujourd'hui n'est pas si hostile aux " Transparents " qu'on le dit. En tout cas, vous êtes le premier homme à avoir honoré cette rubrique de votre présence.
@jezzabel. La 1 ou la 2 ? Ouf ! On l'a échappé belle ! Car savez-vous, chère jezzabel qu'on s"attendait à pire ? Quand Malraux a dit que le 21 ième siècle serait religieux ou ne serait pas, je ne sais pas s'il faisait allusion à vous ( d'après mes calculs, vous n'étiez pas encore née, hélas ). Depuis que vous êtes apparue dans notre ciel, certains se plaignent. Pas moi. Au plus fort de l'orage, il y a toujours un oiseau pour nous rassurer. Et vous êtes celui-là, au gazouillis rocambolesque et au plumage resplendissant. Merci d'avoir contribué au chant des partisans de René Char. Un jour, peut-être, vous figurerez parmi les participants à cette chronique, puisque vous savez bien que les mots ont un sens. Ma sénescence salue bien haut votre jouvence.
Merci @BOSSY pour ce partage, et merci aussi à l'incontournable @Elisabeth M.AÏNE - DUROC qui apporte chaque fois le complément de connaissance sur le personnage à l'honneur.
Cette rubrique est décidément très utile pour notre culture, un plus de mBS que personnellement j'apprécie beaucoup. Je me dis chaque fois : "Ce soir je me coucherai heureux, j'ai appris quelque chose." J'ose l'avouer, je n'étais pas porté sur la poésie contemporaine. Mais grâce à mBS en particulier, je me laisse aller à découvrir des écrits de nos poètes, constatant que leur succès d'audience laisse supposer qu'il y a quantité d'amateurs pour ce genre. Cordialement.
@Les poètes. Alors, messieurs, il n'y a que les dames pour aimer un poète ? Vous savez qu'il fut guerrier aussi, bien que furieux de l'être. Qu'il mangeait et buvait comme quatre, et fumait comme un pompier. De chaque mot, il faisait une devinette. Qu'il avait une voix qui faisait fuir les mouettes.Allez, messieurs, soyez les égaux de ces dames, pour une fois...
@Catarina Viti. Ah, Non, faut pas pleurer ! Ce n'est pas le genre du monsieur. Tu n'es pas femme au bord du gouffre, mais au bord du monde. Ce monde que Char a constamment entre les lèvres seulement. Ta solitude, où est ton trésor enfoui ?
@Elisabeth M. AÏNE-DUROC. Vous avez l'âge qu'il faut. Prenez un billet d'avion et filez au Pérou. Vous y apprendrez les espaces, la hauteur, la lumière, la beauté. C'est vrai, il faut pouvoir marcher, grimper, redescendre, remonter, courir, rire et danser, ouvrir les yeux et le coeur. Apprenez un peu de la langue pour dire bonjour, merci, où c'est ? Manger, dormir et c'est tout. Sac à dos. Bonnes chaussures. Après 40 ans, j'ai encore plus d'amis là-bas qu'en France, malgré la distance. Allez voir comment les gens pauvres vivent avec le sourire et ont quelque chose à vous donner. Partez à deux si vous pouvez, c'est mieux. Vous reviendrez en ayant appris qu'on ne se plaint pas des tremblements de terre, des inondations, de la faim et de la misère et qu'on a confiance, on danse quand-même. On ne pleure pas, on enterre avec de la musique, et on repart en avant. Vous apprendrez les fleurs, les fleuves, les routes défoncées, les chemins de l'Inca , les fêtes de village, les carnavals, les processions si vous voulez, le vol des condors, les mouettes en rase-mottes. Vous vivrez, c'est ce que je vous souhaite. Et pour la poésie, vous marcherez dedans, dessus, partout. Tout le reste, on vous l'expliquera sur place. Amitiés . Gérard
Il est des déclarations d'amour qui font penser à un rayon de soleil. Vous savez, ce trait de lumière hivernal, qui se pose le matin sur l'étagère pour s'évanouir presque aussitôt. Il est comme un sourire, une ode à la vie. Quelque chose qui parle du bonheur et de l’impermanence des choses. Très bel article, beau et simple. Voilà ce qu'est selon moi l'élégance de l'écriture. Merci Bossy !
Bien cher @BOSSY, honnêtement, c'est moi qui suis heureuse d'avoir pu collaborer à cet article, car c'est vous qui m'avez fait découvrir René Char, que je ne connaissais que de nom. En plus d'avoir été émue par l'homme et le destin en me plongeant dans l'étude des éléments de sa biographie, j'ai été, je dois l'avouer, bouleversée par votre témoignage. Quelle profondeur dans vos mots ! Quel humour qui émaille si bien l'intensité du vécu, comme on trace une ciselure sur un bijou ! Vous avez fait résonner pour moi les labeurs, les sueurs et les doutes, les victoires et les élans de cet auteur que vous chérissez, sous les latitudes poudreuses et dorées de ce Pérou que j'aime tant depuis l'enfance, et où je n'ai jamais eu l'occasion de me rendre de pied ferme ; d'esprit seulement. Aimer profondément et tâcher de transmettre l'essence intime, c'est allumer une bougie sur un chandelier qui a déjà servi (je fais ma poétesse...), et c'est ce que vous êtes parvenu à faire. René Char et Gérard Bossy : deux noms qui désormais, pour moi, sont liés. Merci à vous.
Élizabeth.
P.S. : cela revient à dire que vous savez drôlement bien dessiner les moutons...
@Elisabeth M.AÏNE - DUROC. Merci pour votre complément biographique. J'ignorais l'épisode de la morsure par un chien enragé ! Ce fut peut-être la cause de Fureur et Mystère...Sur mon bureau, j'ai deux bibles: Feuillets d'Hypnose et Le Petit Prince, mes quatre points cardinaux. Bien à vous
Ah, je savais bien @Lamish que tu serais la première à ajouter ton grain de sel ! Je suis heureux de te servir de lampe tempête parmi les oliviers qui bordent la Finca et qui mènent au lac où tu méditeras les prochains mails de Lounis. Car cette année est la bonne, la décisive, celle du T2 ! Mais oui, serre ton bonheur et reviens de ton risque, pour qu'ils s'habituent, tous. Va dire à Nour que Lounis l'attend !