Interview
Le 29 Jan 2024

Pourquoi aimer la fantasy ? Par A.P. GOUNON pour monBestSeller

Les écrivains de fantasy s’entendent souvent dire : "Je ne suis pas fan de cette littérature ". Il semblerait, en effet, que la fantasy soit mal aimée… voire un peu méprisée… Pas assez littéraire ? Pas assez concrète ? Destinée aux enfants ? Et pourtant… et pourtant… vous devriez tous l’aimer ! Pourquoi ?
Tribunes monBestSeller -  Pourquoi aimer la fantasy ? Par A.P. GOUNON

Première raison d’aimer la fantasy : elle est le support de notre inconscient.

Parce qu’elle est dans nos gênes ! Parce qu’elle est dans notre inconscient collectif !

Car la fantasy remonte à la plus haute antiquité ! (Comme dirait l’ami Vialatte) 

Sans même parler de tous les mythes du commencement du monde où, dans tous les pays, pullulent les dragons, les géants, les serpents, la première œuvre de fantasy date du deuxième millénaire avant J.C. et n’est autre que "L’épopée de Gilgamesh", dont le héros va chercher une fleur d’immortalité auprès d’un mage, et rencontre des hommes scorpions et des forêts de pierres précieuses…

Nous avons aussi le Râmâyana, et la Bible, où des mages sont conduits par une étoile et où la mer s’ouvre toute seule.

La mythologie grecque nous offre deux magnifiques héros de fantasy : Hercule et Ulysse. Hercule doit affronter des animaux fantastiques : l’hydre de Lerne dont les têtes tranchées repoussent sans cesse, les oiseaux du lac Stymphale aux plumes d’airain, le chien Cerbère à trois têtes…

Quant à Ulysse, sa quête pour retrouver son royaume est sans doute le plus merveilleux roman de fantasy. On y rencontre le cyclope Polyphème, la magicienne Circé, des sirènes, des pays fabuleux (Lotophages, Lestrygons)… 

 

Puis nous arrivons à l’âge d’or de la fantasy : le moyen âge, avec la "matière de Bretagne" : Le roi Arthur, la table ronde, la quête du Graal. Nous retrouvons là tous les ingrédients de la fantasy : des magiciens (Merlin, Morgane), des fées (Viviane), des dragons en quantité, et des héros purs en quête d’un objet extraordinairement précieux. N’oublions pas les sagas nordiques et germaniques. N’oublions pas Ygdrasill, l’arbre qui soutient le monde…

Nos écrivains de fantasy contemporains ne les ont pas oubliés, et le Gandalf de Tolkien, ou le Dumbledore de J.K. Rowling sont très inspirés de Merlin.

 

Deuxième raison d’aimer la fantasy : son absolue liberté

Elle se rit de l’espace-temps comme de la logique, ces carcans. Dans "Chronominets", Asimov imagine des chats de trente centimètres de long, quinze centimètres de haut et dix de large qui s’étendent jusqu’à la semaine suivante !!!

Dans "Le voyageur imprudent", Barjavel fait voyager son héros dans le temps, et arrive ainsi à un paradoxe temporel : il tue son ancêtre avant qu’il ait procréé, donc il n’existe pas. Mais s’il n’existe pas, il n’a pas pu tuer son ancêtre ! 

 

Troisième raison d’aimer la fantasy : elle répond à un besoin fondamental de l’être humain 

S’évader dans le rêve. Elle divertit, elle émeut, elle émerveille, elle devient une thérapie. 

Certes, pour cela, il faut accepter de jouer le jeu, il faut accepter la "suspension consentie de l’incrédulité" dont parlait Antall dans une tribune récente. Mais, après tout, tous les romans de fiction l’exigent. D’ailleurs, elle peut aussi traiter des thèmes sérieux et contemporains : Ursula K. Le Guin, la grande dame américaine de la fantasy, a abordé le féminisme, l’identité sexuelle, les inégalités.

Mais, bien sûr, son domaine de prédilection, c’est le rêve, et Shakespeare vient aimablement m’aider à conclure :

 

"Nous sommes faits de l’étoffe de nos songes."

 

 A.P. GOUNON

 

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14 CommentairesAjouter un commentaire

@A.P. Gounon
Chère Anne, suite à ta réponse, je suis allée faire une visite sur Wikipédia. Effectivement, c'est très très glauque, et je ne vais pas m'en sortir avec une pirouette du genre "Mais je n'ai rien lu d'elle depuis 2015". C'est dommage parce que ses livres sont très agréables à lire. Comme quoi, il ne faut jamais fouiller dans la vie des artistes.On peut y trouver des frelons et des cactus qui piquent. D'ailleurs, une tribune sur la vie privée de certains auteurs se révélerait fort instructive... Merci Bisous Merci et très bonne fin de semaine.

Publié le 02 Février 2024

@Parthémise33. Bonsoir chère Parthémise. Je savais qu'une personne qui a ton imagination et ton ouverture d'esprit devait aimer la fantasy. ( Comme le dit Desproges, l'ouverture d'esprit n'est pas une fracture du crâne...)
En ce qui concerne Marion Zimmer Bradley, j'avoue ce que l'on sait de sa vie privée me rebute. Bien sûr on ne doit pas mélanger l'œuvre et la vie mais...
Bonne nuit et bises. Anne

Publié le 02 Février 2024

@Zoe Florent. Bonsoir chère Zoé.
Je suis enchantée que tu aies aimé mon univers, bien sûr. Et c'est vrai qu'il y a différentes sortes de fantasy et qu'on peut choisir celles où on se sent bien.. C'est vrai aussi que c'est une littérature populaire, et que tous les espoirs sont permis ! Je t'embrasse et te souhaite une bonne nuit. Anne

Publié le 02 Février 2024

@A. P. Gounon Chère Anne, La fantasy, j’adore ! L’écrivain peut laisser aller son imagination sans trop de contraintes physiques , le lecteur le suit sur son chemin et s’en régale. J’ai lu avec délectation pratiquement tous les livres cités. Un petit bémol, mais tout petit, petit, Marion Zimmer Bradley n’est pas citée. Merci Bisous Merci pour cette chronique qui m’a rappelé de merveilleux souvenirs de lecture

Publié le 31 Janvier 2024

@A.P. Gounon Bonjour chère Anne,
Quand @Yannick A. R. FRADIN (bonjour, Yannick ;-) !) écrit "Lire de la fantasy, c'est un peu rêver les yeux ouverts", je trouve cela très juste, et la diversité des univers proposés dans le genre permet de trouver ceux qui répondent le mieux aux nôtres.
Ainsi, j'ai eu un coup de coeur pour ton oeuvre tandis que je m'ennuie très vite lorsque je lis de la fantasy gavée d'action et de super-héros, par ailleurs plus prisée par la jeunesse.
Ceci dit, la SF, qui comprend la fantasy, faisait encore partie des genres les plus populaires en 2023, aux côtés de la fiction, la non-fiction, la romance et le roman policier. Tous les espoirs sont donc encore permis ;-).
Merci pour ce billet, bises et bonne soirée,
Michèle

Publié le 31 Janvier 2024

Merci pour cet article intéressant. Je me reconnais complètement dans le profil de la personne qui dit "ne pas aimer la fantasy" et aime plutôt ça, finalement, lorsqu'elle s'y retrouve confrontée.

Publié le 31 Janvier 2024

F. J. Lécollier. Vous avez tout à fait raison : écrire un roman de fantasy demande à la fois de l'imagination ET de la rigueur...

Publié le 30 Janvier 2024

@Catarina Viti. Ainsi j'ai réussi à être convaincante ! Votre commentaire m'a fait un grand plaisir, chère Catarina. Merci infiniment. Et je vous souhaite de délicieuses lectures...

Publié le 30 Janvier 2024

@Marie Berchoud. Ce que j'en pense ? Je suis d'accord avec vous, Marie ! En fait, la phrase : "elle a forgé notre inconscient" n'est pas de moi. Elle a été ajoutée en titre par Mbs. J'avais seulement écrit qu'elle était dans notre inconscient. Par conséquent je n'avais pas mis la charrue avant les bœufs, et votre grand mère serait contente...

Publié le 30 Janvier 2024

@Yannick A.R. Fradin. Merci Yannick pour ce charmant commentaire et ce clin d'œil à Saint Ex...

Publié le 30 Janvier 2024

Bonjour,

Merci pour votre article et ses nombreuses références documentaires : on y voit clairement comment la fantasy s'inscrit dans la continuité des grands mythes et des légendes anciennes. Et à ceux qui la jugeraient un peu hâtivement en la traîtant d'enfantine, on pourrait répondre qu'il n'y a pas de limite d'âge pour stimuler son imaginaire (j'ai même l'audace de penser que c'est une des clefs du bien-vieillir).

Parmi les genres littéraires insuffisamment (re)connus, la fantasy est sans doute l'un des plus exigeants : elle suppose de construire soi-même le monde dans lequel on fait évoluer ses personnages, et de lui donner une cohérence hors du cadre habituel et des contraintes du réel. Cela demande à la fois de l'imagination et de la rigueur. Le tout en ayant l'air d'une littérature "facile" au prétexte qu'elle est agréable à lire et incite à la rêverie.

Publié le 29 Janvier 2024

Véhicule de notre inconscient collectif ? En tout cas, merci Anne, pour votre tribune. Je n'avais jamais envisagée la Fantasy sous cet angle. D'une rafale de touches de clavier, vous venez de donner la motivation à explorer ce continent auquel je me croyais étrangère avant de découvrir qu'un grand nombre de mes textes préférés appartiennent au genre. Et l'envie de découvrir cette Ursula K Le Guin !

Publié le 29 Janvier 2024

@ AP GOUNON. Merci pour votre chronique mais, comme disait ma grand-mère (aujourd'hui au paradis des grands-mères) " faut pas mettre la charrue avant les boeufs". Ainsi, la fantasy puise dans l'inconscient individuel et collectif (ils se croisent et font parfois des noeuds coulants) mais elle n'est pas à l'origine de cet inconscient, bien plus ancien sans doute, elle serait plutôt une de ses innombrables filles, avec les contes (sur cela, lire W PROPP), la poésie épique, et les voyages culturels ou interculturels. Qu'en pensez-vous ?

Publié le 29 Janvier 2024

Bonjour et merci pour cette invitation à lire de la fantasy. Bon, c'est déjà mon genre de prédilection, donc ça n'influencera pas beaucoup mes envies de lecture, mais je rejoins sans réserve les raisons énoncées ci-dessus et j'avoue aimer tout particulièrement la phrase de conclusion. Nous sommes faits de l'étoffe de nos songes et, pour faire un clin d'oeil à un auteur français que vous reconnaitrez facilement (sinon, n'hésitez pas à demander !) : faites que vos rêves dévorent votre vie, plutôt que de laisser votre vie engloutir vos rêves. Lire de la fantasy, c'est un peu rêver les yeux ouverts et faire des voyages que nos seules jambes ne sauraient nous offrir.

Publié le 29 Janvier 2024