Actualité
Le 14 mai 2025

Mangas : du Japon aux poches des ados du monde entier

Phénomène culturel mondial, le manga dépasse aujourd’hui le simple divertissement pour devenir un langage universel. Mais d’où vient cet engouement ? Et pourquoi séduit-il la jeunesse du monde entier ? Retour sur une révolution graphique aux visages multiples.
 Le manga dépasse aujourd’hui le simple divertissement pour devenir un langage universel. Le manga dépasse aujourd’hui le simple divertissement pour devenir un langage universel.

Le manga est un art japonais contemporain, mais aux racines ancestrales

On croit souvent que le manga est un phénomène récent, né dans les années 80 ou 90. En réalité, ses racines plongent bien plus loin dans l’histoire japonaise. Dès le XIIe siècle, les rouleaux illustrés (emaki) racontaient déjà des histoires en images, souvent comiques ou satiriques. Mais c’est après la Seconde Guerre mondiale que le manga moderne prend véritablement son envol, sous la plume de Osamu Tezuka, créateur d’Astro Boy, influencé par le cinéma d’animation et les comics américains.

Aujourd’hui, le mot "manga" désigne une bande dessinée japonaise publiée généralement en noir et blanc, avec une lecture de droite à gauche. Mais ce genre a essaimé partout, inspirant des créations en Corée (manhwa), en Chine (manhua), mais aussi en France ou aux États-Unis. S’il est d’origine japonaise, le manga n’est plus un territoire exclusif.

Un miroir social du Japon et de ses mutations

À la différence de la bande dessinée occidentale souvent cantonnée à la jeunesse, le manga est un média de masse au Japon, lu par toutes les tranches d’âge. Des mangas pour enfants (kodomo) aux récits adultes (seinen, josei), il couvre tous les genres : sport, romance, guerre, science-fiction, cuisine, travail, politique…

Mais au-delà de la diversité, une constante demeure : le manga reflète les tensions, les rêves et les contradictions de la société japonaise. On y lit la solitude urbaine (Solanin), la pression scolaire (Blue Period), les traumatismes de guerre (Gen d’Hiroshima), les débats identitaires (March Comes in Like a Lion), ou encore les luttes sociales et féministes (Perfect World, Tokyo Tarareba Girls).

Les héros sont rarement parfaits. Ils doutent, chutent, se relèvent. On célèbre plus l’effort que la réussite, la fidélité que la victoire. Il y a souvent une morale implicite : la croissance personnelle par l’adversité.

Mangas : un objet culturel devenu étendard national. Plus qu’un phénomène de mode, une langue mondiale

À l’instar du sushi ou du kimono, le manga est désormais un emblème de l’identité japonaise à l’international. Il est l’un des piliers du "soft power" nippon. Grâce à lui, des millions de lecteurs ont découvert le Japon autrement que par le prisme de la guerre ou des jeux vidéo.

Des références au bouddhisme, à la mythologie shinto, aux festivals traditionnels, ou même aux plats du quotidien parsèment les récits. Le manga, bien que fictionnel, documente aussi une culture vivante.

Les grandes villes japonaises – Tokyo en tête – ont d’ailleurs parfaitement intégré ce rôle. Quartiers entiers comme Akihabara (Tokyo) ou Denden Town (Osaka) sont devenus des lieux de pèlerinage pour les fans du monde entier. Et des musées, expositions ou festivals consacrés au manga fleurissent à l’étranger.

Les mangas subissent une mutation accélérée liée à la mondialisation numérique

La vague mondiale du manga commence véritablement dans les années 1990 avec des séries comme Dragon Ball, Sailor Moon, One Piece ou Naruto, diffusées dans des émissions jeunesse comme le Club Dorothée en France. Ces titres deviennent des phénomènes générationnels. Mais c’est surtout l’explosion d’Internet et du streaming qui va tout changer.

Aujourd’hui, des plateformes comme Netflix ou Manga Plus rendent les mangas et leurs adaptations animées disponibles partout, souvent en simultané avec le Japon. On passe du format papier au numérique, du feuilleton hebdomadaire à la consommation en rafale.

Les frontières s’effacent, les communautés se multiplient sur TikTok, Instagram. Le manga devient un terrain d’expression, de fanfictions, d’analyse critique.
Une culture vivante et participative.

Pourquoi les jeunes y adhèrent-ils autant ?

Si le manga touche toutes les générations, il trouve une résonance particulière chez les adolescents et jeunes adultes parce qu’il parle directement de leur monde : la construction de soi, les dilemmes moraux, la marginalité, la découverte de l’amour ou de la sexualité, la rébellion contre les normes.

Les héros sont jeunes et grandissent avec le lecteur, ils offrent des modèles alternatifs à ceux proposés par les récits occidentaux : des filles fortes, des garçons sensibles, des personnages LGBTQ+, des héros imparfaits. Les genres sont décloisonnés : dans un même manga, on peut passer du drame au burlesque, de l’action à la poésie. Les univers sont immersifs, denses, on peut s'y investir émotionnellement.

Tout cela crée un vivier de références multiple et maléable dans lequel des générations entières peuvent se projeter.

Et maintenant ? Vers une nouvelle ère du manga

Le manga n’a jamais été aussi populaire. En France, il représente plus de 50% des ventes de bandes dessinées. Il inspire désormais des artistes locaux (appelés "franga") et des écoles d’art spécialisées. Des titres comme Spy x Family, Jujutsu Kaisen ou Chainsaw Man confirment que le genre ne s’essouffle pas.

Mais il évolue : les auteurs s’interrogent sur le rythme effréné des publications, les conditions de travail précaires dans l’industrie, et les enjeux de représentativité.
Le manga reste donc un espace de création mais aussi de résistance, de réflexion et d’émancipation.

Le manga n’est pas un simple passe-temps. Il est devenu un outil de narration universel, capable de rassembler, d’émouvoir, de questionner.
Il croise l’intime et le politique, le local et le global. Pour la jeunesse, il est autant un refuge qu’un laboratoire d’identités.
Et pour le monde entier, il est la preuve qu’une culture, aussi spécifique soit-elle, peut parler à tous.

Vous avez un livre dans votre tiroir ?

Publier gratuitement votre livre

Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…

L'article est passionnant, car j'ai surtout lu des romans policiers japonais, mais pas de Mangas. Le thème de la croissance personnelle par l'adversité est fréquent dans la littérature nippone. Les mangas sont également adaptés au cinéma, ce qui démontre leur popularité. @Sylvie de Tauriac

Publié le 27 Mai 2025

Comme plusieurs personnes sur ce site je suis amatrice de mangas. J'adore le fait qu'ils mêlent thématiques de société, mythologies entre autres aventures. J'ai découvert récemment l'Atelier des Sorciers et c'est un gros coup de coeur ! Ce qui est dommage une fois encore c'est que certains stigmatisent le manga comme une "fausse lecture" alors qu'au contraire un jeune ou toute autre personne qui n'aime pas forcément les romans devrait être encouragée dans sa démarche.

Publié le 22 Mai 2025

J'aime bcp le manga, l'univers, l'illustration, l'histoire. Je passe toujours un bon moment en en lisant

Publié le 22 Mai 2025

Excellent texte pour découvrir le monde des mangas, dont je suis fan aussi. Les estampes japonaises des xviiie et xixe siècle fourmillent de détails, de petits personnages secondaires et de saynètes traités sur le mode caricatural qui sont déjà des mangas avant la lettre.

Publié le 22 Mai 2025

Peu de gens savent que les premiers mangas viennent d'Hokusaï !
Pour ma part je suis fou des haïkus !

Publié le 21 Mai 2025