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Du 12 mar 2021
au 12 mar 2021

Journal intime d’une obsédée du texte

Les tribulations, l'apprentissage, les chutes et les relèves d'une obsédée du texte. Quand elle rédige un article, elle se relâche, pour mieux se ressaisir quand elle écrit pour de bon. Elle se pâme sur ses prochains écrits, et se désole de ses anciens textes. mBs compte les points des chaos d'un écrivain.
Quel support valorisera le mieux mes écrits ?Quel support valorisera le mieux mes écrits ?

janvier 2016

je ne sais pas ce qui me prend ces derniers temps… le doute, probablement.

l’année dernière, sous mon vrai blase, j’ai posté un bouquin sur mBS. Pluie d’étoiles immédiate, alléluia, sonnez hauts-bois, résonnez trompettes ; même qu’ils ont écrit "Un prix Concours qui a tout d’un prix Goncourt". Je n’ai plus réussi à enfiler mes santiags. Jusqu’au vendredi 9 décembre… le jour du râteau. C’était hier ou presque. V’en ai engore les dents qui flavollent…

janvier 2016

j’ai décidé de changer de nom… le doute, probablement. J’ai comme qui dirait l’impression d’avoir collé mon nom au bas de parchemins plutôt chelous.

courant 2016

changer de nom ne suffit pas. Nandidiou, faut que j’aille plus loin.

courant 2016, un peu plus tard

deux gus se proposent de devenir mes bêta-lecteurs. Cool. Je ne savais même pas que ça existait, ces bêtes. Z’ont l’air sympas. Je vais leur envoyer mon dernier texte en ligne, mon fucking bestseller incompris.

j + 3

la bêta-lectrice, une certaine madame B. me renvoie mon texte. Elle l’adore, mais elle trouve que j’ai la ponctuation déconnante et que j’oublie des coquilles. Elle me corrige des virgules partout. Elle m’agace, si elle savait à quel point. Heureusement, elle se pâme devant le reste. Ouf. Terminarès. Ce n’était que cela, la bêta-lecture. De toute manière, je ne vois pas ce qu’il y aurait à redire d’autre sur ce texte.

j + 7

tiens, un message de l’autre bêta-lecteur. J’aurais dû lui dire que c’est tout bueno, qui se casse pas le bol. Madame B. a corrigé mon texte. Tant pis, j’ouvre son .doc.

j + 8

après une nuit d’insomnie ponctuée de brefs cauchemars, je me demande encore ce que j’ai fait au Bon Dieu pour être si bête. Qu’est-ce que je suis allée demander à cet monsieur L.

j + 9

la vache ! j’ai rêvé que je noyais l’autre nase. Dans le rêve suivant, assez violent, j’en faisais des brochettes. La question que je remâche en buvant mon café : « Pour qui il se prend, ce gros con ? »

j + 10

je viens de prendre une décision : je déchire mon billet de train pour Antibes. Je n’irai pas flinguer monsieur L. à bout portant. Je range mon soufflant dans l’armoire. Après avoir fait dix minutes de pompes et autant d’hypoventilation, j’ouvre une nouvelle fois son .doc.. Mon texte est entièrement stabilé en jaune et toutes mes phrases réécrites en rouge gras (je me mets illico à détester le jaune fluo et le rouge gras). Je lis. L’enflure n’a pas tort. J’écris comme un pied. La vache.

à partir de cette date

je n’ose plus publier une phrase. Même un mail. Je le relis cent fois. Je dors en chien de fusil, encadrée à droite par Robert, à gauche par Bécherel. La nuit, je réécris dans ma tête ce que j’ai écrit le jour. Le lendemain, je relis mes mails de la vieille que je n’ai toujours pas envoyés. Horreur, j’ai mis une virgule en trop dans la troisième phrase.

avant de publier la moindre ligne, je l’envoie à madame B. qui me répond dans l’heure que c’est très beau, qu’elle a beaucoup ri ou pleuré, mais que je ne sais toujours pas où mettre la virgule, c’est pourtant pas compliqué, qu’est-ce que j’ai donc ?

avant de publier la moindre ligne, par mesure de sécurité, j’envoie aussi mon truc chez monsieur L. qui me retourne invariablement un texte tout stabilé en jaune fluo et réécrit en rouge gras.

peu à peu, je m’habitue. Je m’écrase.

après quelques mois

il me vient de plus en plus souvent à l’esprit que je ferais mieux de me consacrer à mon jardin potager. Là, au moins, je sais comment m’y prendre.

fin de l’année

je confie mes doutes à mes bêta-lecteurs pour lesquels j’éprouve de plus en plus d’admiration. Que serais-je sans eux ? Mais brèfle, j’ai l’habitude d’en baver dans l’existence ; ce ne sont pas ces petites difficultés qui vont me faire dévier de ma route.

(parfois je me pose des questions sur la santé mentale de mes bêta-lecteurs…)

(hélas, quand je reçois leurs corrections, je vois que j’ai toujours tort et qu’ils ont toujours raison).

novembre 2016

des auteurs ont fait une manif auprès de la direction de mBS pour demander que mon bouquin Femme au bord du Mondesoit sélectionné pour le Prix Concours. Elen Brig Koridwen, qui ne veut surtout pas être éditée, mais qui a été sélectionnée tout de même, propose à mBS de me céder sa place, ce qui trancherait le nœud gordien. Ce bouquin mal écrit aurait-il une valeur malgré tout ?

décembre 2016

je reçois un message d’une certaine madame J. qui s’illustre sur le site avec un écrit intitulé Les aventures de ma fente (ça ne me rassure pas). Elle veut me donner un coup de main (mais pas sur Femme etc. qu’elle taxe de coquecigrue -encore un mot que je découvre). Je dis oui. Nietzsche a écrit Il faut vivre dangereusement. Je crois en Nietzsche.

2017

je passe l’année à réécrire trois ou quatre fois mon bouquin Femme au bord du Monde. Et je me lance dans la rédaction de novellas.

madame J. m’attaque grave le choux. Elle en fait beaucoup moins que monsieur L. question stabilo, mais elle creuse plus profond. La vache, one more time. C’est quoi cette vie dans laquelle tout le monde sait mieux écrire que moi ?

2018

parallèlement aux deux premières novellas de la série Blues que j’ai réécrites plusieurs fois, j’ai énormément travaillé sur un pavé intitulé Adieu Amériques. Madame B. m’a dit que c’était absolument super, mais que c’était mieux avant ; monsieur L. m’a envoyé un pneumatique pour me dire que ça merde à tous les étages, et qu’il va s’y mettre dès qu’il a fini son chantier en cours.

2019

une des novellas, Calibre 12, que j’ai réécrite 200 fois (dont 198 dans la plus profonde des solitudes) est sélectionnée pour le Prix Concours et remporte un énorme succès d’estime auprès des lecteurs de tous poils.

j’envoie mon pavé Adieu Amériques à madame J. dans l’espoir qu’elle vérifie qu’il ne reste pas de coquilles. Elle me retourne un mail consterné : ma chérie, je crois hélas qu’il faut tout réécrire.

2020

après des années de relation sadomasochiste avec mes deux bêta restants, je décide d’écrire dans le plus grand secret un texte court qui finira par trouver son titre : Tribulations de krill en rupture de ban. « Au cul la balayette, me dis-je, et advienne que voudra ! ».

2 mars 2021

hier, je suis tombée sur un de mes textes écrit en 2015. Hou-là.

finalement, j’ai pas mal fait d’en baver et d’en… Comme disait Dac : celui qui est parti de rien pour arriver à pas grand-chose n’a de merci à dire à personne. Eh bien tant pis, je leur dis quand-même merci, à mes bêta-lecteurs.

Catarina Viti

 

 

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21 CommentairesAjouter un commentaire

@lamish

Je ne pouvais laisser cet hommage au béta-lecteur, vierge de mes remerciements à l’égard
du Simon de Cyrène qui s’offrit de m’aider à boucler mon calvaire.
— Vous voulez un coup de main ?
Comme ça, pour peanuts !
Comme si ma voisine frappait à ma porte avec ses gants bleus en latex et son tablier « les hommes c’est comme les casseroles … »
— Ne le prenez pas mal, Monsieur Lanzenac, mais auriez-vous la gentillesse de m’autoriser à briquer votre T2 du sol au plafond ?
— J’veux bien Joceline, mais y a du taf !

Que l’on me lise me surprit, que l’on se propose à me corriger m’émut, avec quand même ce scrupule qui vêt l’honnête homme, lorsqu’il délègue à autrui un pénible labeur.
J’ai envoyé « De la CAF au grenier » en noir et blanc, il m’est revenu en couleurs. Ne voyez pas là l’évocation des coups de griffes du stabiloboss, si nombreuses qu’un instant je crus à l’emploi d’une nouvelle police de caractère, pensez plutôt « relooking » . L’impression fut la même que celle ressentie, quand après sept ans sans soins, ma Golf m’apparut, sortant méconnaissable des rouleaux de chez « CarWash ».
Alors merci Mimi ! (@lamish) , et à tous les correcto-bénévoles .

Publié le 01 Avril 2021

Quel parcours! Heureusement, vous n'avez rien lâché, ce qui nous a permis de rencontrer votre plume (et pas que)! De 2016 à 2021, on aurait cru avoir vu 5 siècles passer tout doucement! Il y a des jours où je me demandais tout bêtement si des talents comme vous avaient des "bêta-lecteurs" (mot que j'ai découvert ici sur mbs). Bref, espérons pour bientôt le Prix Goncourt...En attendant, merci de bien vous occuper de nos virgules, pour ce qu'il en est du parrainage.
Mes salutations filiales.

Publié le 27 Mars 2021

@Yvan Ollive. Y en a... Y en a aussi... Et mBS, le bac à sable où nous devrions réussir à jouer sans nécessairement chercher à crever l'œil du voisin. A bientôt.

Publié le 16 Mars 2021

@Annie Pic. Bonjour !
Arh... le doute, le doute... suprême délice masochiste, douleur exquise, supplice divin... Encore ! Encore !

Publié le 16 Mars 2021

@Parthemise33. D'autant que l'exercice conduit fatalement au plus près de l'auteur ! (aïe!) Souvent la bêta-lecture entraîne le lecteur vers des territoires où il n'y a plus de frontières entre la qualité du texte et les conditions existentielles de l'auteur (ouille!). Notre façon d'écrire nous trahit toujours. Les mots que nous écrivons, nos lapsus, la clarté ou le manque de clarté de nos phrases, le déroulé des idées... sans parler, bien entendu, des thèmes que nous choisissons et notre manière de les traiter... Et dans un texte encore inabouti, ça fait couac-couac-prot-côt-côt-codêêê^^^!

Publié le 16 Mars 2021

Bonjour à tout le monde.
Chez les lecteurs, il y a des lecteurs auteurs. Chez les auteurs, il y a des auteurs lecteurs. Chez les lecteurs il y a des bêta lecteurs et il y a même des lecteurs auteurs, bêta lecteur...
Il y a t'il des bêta lecteurs de bêta lecteurs ? Parce que dans ce cas là, il y aurait des lecteurs bêta lecteurs de bêta lecteurs et des lecteurs auteurs bêta lecteurs de bêta lecteur...A j'allais oublier les commentateurs, parce que vous savez, chez les lecteurs, il y des commentateurs...
Pas beaucoup fait avancer le débat, mais en tout cas pour ce qui me concerne, c'est tout ce petit monde qui m'a fait avancer. Merci à tous.

Publié le 15 Mars 2021

Le doute, encore le doute ! Surtout ne pas se laisser envahir.
Facile à écrire, mais combien difficile à mettre en application.
Le flop, difficile à encaisser. Se ressaisir !
Demain sera un jour meilleur. Oui mais...
Ma vision du monde, pourquoi n'est-elle pas comprise ?
Aujourd'hui, je devrais friser le firmament.
Je suis nul(le), je ne sais pas aligner deux phrases. La ponctuation, un véritable cauchemar.
Mes anciens écrits ? ils me dépriment.
Pourquoi je m'obstine ? Dois-je renoncer ?
Mes bêta-lecteurs ! Fut un temps, la cohorte m'a encensé(e).
Pour mieux m'éliminer ?
Je range tous mes manuscrits dans un tiroir. J'oublie le passé.
Pour continuer, encore et encore...

Chère @Catarina Viti, ne désespérez pas. La nature humaine est ainsi faite. Mais le bonheur de créer, de livrer ce que vous portez en vous, sera toujours la plus belle des réussites. N'attendez rien, tout viendra.

Publié le 15 Mars 2021

@Kroussar
J’ai lu l'article de Jean-François Revel.
Je suis d'accord avec ce monsieur de la première à la dernière ligne.
Histoire de le faire savoir aux lecteurs de cette chronique, voilà entre autres ce que disait ce monsieur en 1999 :
------------------------------
Si notre gouvernement veut servir le français, il ferait mieux de veiller d’abord à ce qu’on l’enseigne en classe,
-------------------------------
Ils (notre gouvernement) ont trouvé le sésame démagogique de cette opération magique : faire avancer le féminin faute d’avoir fait avancer les femmes.
Merci de m’avoir fait connaître cet article.

Publié le 14 Mars 2021

@Catarina Viti Effectivement, bêta-lire apprend aussi beaucoup sur ses propres exigences de lecteur… et d’écrivant ! C’est aussi l’un des grands enrichissements de l’exercice. À bientôt !

Pour ce qui est du "lectorat captif", je ne l’avais pas vu de la sorte, mais vous avez raison ! La plupart des lecteurs du site semblent être des auteurs qui postent également des textes… C’est une double attente qui se croise, le lecteur-auteur ayant forcément des exigences ou des attentes qui transparaissent dans ses propres textes ; les auteurs-parfois lecteurs choisissant sans doute de lire des textes s’approximant de leurs propres écrits… Ce qui fait de mBS un "petit bain" bien différent de la piscine olympique des rentrées littéraires officielles, et du vaste océan des publications indés présentes sur Amazon, BoD, etc. Mais les attentes d’un lecteur-lambda ne sont-elles pas peu ou prou les mêmes, se laisser emporter par un récit et des personnages ?

Publié le 14 Mars 2021

@Fernand Fallou
/n
Cher Fernand, je suis entièrement d'accord sur le sexe des mots : car leur genre n’a rien à voir avec le sexe de la personne qu’ils concernent. Jean-François Revel avait fait un très bel article sur la féminisation des mots, en 1999 :
/n
https://chezrevel.net/le-sexe-des-mots/
/n
PS : vingt ans plus tard, on marche sur la tête... La France est devenue folle.

Publié le 14 Mars 2021

@Catarina Viti, Avec votre chronique, vous avez réjoui mon âme profonde (oui, comme beaucoup, j’ai une âme profonde). C’est vrai qu’après avoir créé, nous avons tous besoin de nous confronter au regard des autres. Nous sommes animés par le sentiment sous-jacent de l’enfant que nous étions, lorsqu’il apportait à sa maman, le cœur battant, mais un sourire de fierté gambadant sur les lèvres, son premier dessin de M. Patate. C’est là que le β lecteur entre sur la scène. J’ai un ami qui m’a fait lire un poème que seuls les très proches connaissaient. Dans l’attente de mon jugement, il y avait les foies qui s’entrechoquaient. J’étais devenue un β lecteur exogène. Et puis, j’ai « testé » les β lecteurs. Il y a les enthousiastes qui trouvent « Trop d’la balle , ton truc là ! » , mais qui en fait, adeptes de la lecture rapide, ont lu en diagonale et n’ont remarqué ni les fôtes, ni les incohérences. Ceux qui, blasés ou inspirés par le démon de la jalousie, éreintent votre baby. Enfin, après moult tâtonnements et déceptions, le graal ! On les trouve Nos β lecteurs en or pur. Ils recadrent nos erreurs orthographiques, flairent la répétition. Conseillent finement, encouragent l’écorché vif, mais créatif, qui attend leur verdict. On les hait pour les coquilles que nous avons laissées passer, leurs conseils avisés, la réécriture de passages entiers. À cet instant, l’orage de Beethoven sonne à nos oreilles, on hésite entre le foudroiement brutal ou la découpe façon sushis, de ces fâcheux. Puis la nature s’apaise, la raison regagne son trône, nous évitons les assises de justesse. Un sentiment de reconnaissance nous enveloppe et nous bénissons notre correcteur, sa bonne volonté et ses critiques constructives. Alors Merci Bisous Merci à tous les β lecteurs qui se consacrent à cette entreprise : tirer de nos écrits, la substantifique moelle de notre génie.
PS Bravissimo pour le talent et la justesse des propos des intervenants sur cette page.

Publié le 14 Mars 2021

"L'apprentissage littéraire se passe entre soi et soi, ou entre soi et des êtres dont l'âme vient de la même racine."

Publié le 14 Mars 2021

Hello, mister @Fernand Fallou. L'essentiel est de se retrouver autour d'une bonne omelette, non ? Car tout est dans l'œuf et réciproquement !
A une époque ancienne, ma petite marotte était de répéter sur tous les tons que les auteurs devraient mentionner leurs attentes précises (objectifs est encore mieux) dans leur bio. Ainsi, le lecteur saurait adapter sa lunette. Car il serait important le préciser systématiquement, la situation sur un site comme le nôtre n'a pas grand chose à voir avec la "vraie vie littéraire".
La situation est, disons-le ainsi, un "tantinet décalée".
Pour commencer, nous avons un lectorat captif (autrement dit, nous sommes lus par des lecteurs que nous n'aurions pas nécessairement si on lâchait nos textes dans le grand bain).
A cette "captivité", il faut ajouter que l'essentiel des lecteurs sont eux-mêmes auteurs (autrement dit, en recherche d'écriture, en attente des mêmes retours).
Tout cela fait que nous vivons des situations aux contours souvent indéfinis. Pas toujours facile de s'y reconnaître et d'agir en conséquence. Souvent nous faisons l'amalgame entre nos attentes et celles des autres. Je crois qu'il faut avoir cela présent à l'esprit et... mettre de l'huile. Beaucoup d'huile. Des deux côtés.

Publié le 14 Mars 2021

@LadyAutrice1800. Et j'ajouterai que c'est bien pour toutes ces exigences d'équilibrisme que la bêta-lecture romanesque peut apporter autant à l'auteur qu'au lecteur.
Bêta-lire nous oblige à être plus attentifs, car il ne s'agit pas de "corriger" (ce que j'ai longtemps cru), mais de bonifier un texte. Ce qui est tout à fait autre chose. J'ai encore peur de tirer la couverture à moi quand je me livre à cet exercice, de "jouer à la maîtresse" ou au "coach" (horreur). En vérité, j'ai encore beaucoup à apprendre. Je suis actuellement sur un sacré chantier... je nourris l'espoir d'y découvrir énormément de choses sur la lecture et l'écriture, sur les possibilités d'intervention et surtout sur les limites.
A bientôt, chère Lady, pour de belles aventures.

Publié le 14 Mars 2021

Ainsi, tous ceux qui se sont proposés pour lire et corriger mes textes, s’appellent des « bêta-lecteurs ». Je n’en savais rien. Je ne connaissais ni l’expression, ni la profession. Donc, des bêta-lecteurs, j’en veux plus, y a plus de place dans mon jardin. En fait, c’étaient des femmes. Quand je serais mort, vous ferez de ce monde ce que vous voudrez, mais moi je reste coincé sur « le masculin l’emporte sur le féminin. »
Merci à cette chère @Catarina Viti d’avoir si bien décrit ce que je peux vivre au retour d’un document.
A vous lire, tous, je ne sais plus où j’en suis pour trouver le juste équilibre entre la qualité du texte et l’histoire. Bien que j’aie lu pas mal de chose sur ce site où l’histoire m’a complétement échappée. Ce que je lis où il est question de mettre la virgule, avant, après, un peu plus loin ou pas du tout devient plus important que le texte. Je me demande ce qu’en penseraient le capitaine Nemo, Edmond Dantès, ou Jean Valjean et Javert. Bref ! Certains ne parlent même plus de l’histoire, qui à les lire, passe au second plan.
J’ai l’impression d’avoir saboté toutes mes histoires. Le pire, c’est que je le pense sincèrement.
J’ai vécu comme beaucoup d’entre vous, le retour d’un texte complètement stabiloté. Je suis resté longtemps à réfléchir sur « laisser mon mot simple ou prendre celui plus compliqué ou plus riche de mon bêta-lecteur ». Est-ce que ce changement apporte réellement un plus à mon histoire ? Et finalement, vaincu par la supériorité indéniable de la plume de mon bêta-lecteur, j’abdique et je change le mot. Et miracle, quelques jours plus tard, il devient mien ! Idem pour la syntaxe d’une phrase… Non pas Idem du tout ! Là on touche à mon style, à ma façon de dire, d’écrire, cette façon spontanée qui sort des rouages de mon cerveau sans aucune préméditation. Cette première phrase, c’est le sang de ma plume, et là mon bêta-lecteur, il veut le changer ? Bonjour, l’intraveineuse, il se prend pour un docteur… Non mais ! Un peu plus tard ; et pour la nième fois, l’aigle baissait la tête ! Nandidiou !
Et les fautes, nandidiou ! comme dirait Catarina, tous ceux qui s’arrêtent de lire à la troisième fotes n’ont qu’à lire le dictionnaire. Ils seront servis, richesse du vocabulaire et aucune faute.
Les auteurs (grands et petits) de tous les livres écrits avant les années 50 (début du procédé offset) avaient des bêta-lecteurs et des correcteurs d’orthographe et on n’en faisait pas toute une histoire

Publié le 14 Mars 2021

Merci à @Catarina Viti pour cette chronique si intéressante, et abordée avec son humour gouleyant. La bêta-lecture… sujet compliqué s’il en est. Je le sais pour l’avoir beaucoup pratiqué sur des textes professionnels et scientifiques – tant sur le fond que sur la forme – et pour en avoir été bénéficiaire sur des textes de fiction et de non-fiction. Cela demande du tact, et une confiance effectivement partagée. Ce n'est pas rien que d'abandonner son "bébé" dans les mains d'un "book doctor" ou de se charger d'une jeune pousse textuelle sous les yeux angoissés de la mama ou du géniteur !

Pour les écrits scientifiques, pas (trop) de problème (m’enfin, quoi que…) à cerner l’exercice : la traque à la virgule, à la structure de la phrase, au sens, à l’équilibre de la démonstration, aux références. C’est très long, demande de tout repointer, mais c’est relativement facile à appréhender en tant qu’exercice.

Pour la fiction, tout se gâte… et s’améliore. C’est là que l’équilibre devient un exercice de fil-de-fériste. Veiller au sens tout en affinant la petite musique propre à l’auteur n’est pas donné à tout le monde. Il faut vraiment pouvoir se glisser entre les mots, faire siennes ses préoccupations et ses tournures de phrases, son style. Et, à mon sens, entrer réellement dans son univers sans rester uniquement le nez fixé dessus tient de la plus grande habileté ou de l’empathie textuelle. Tout est aussi question de distance juste : il faut pouvoir avoir suffisamment de jeu pour pouvoir bouger les pièces du puzzle sans dénaturer le contour.
Et, effectivement, @lamish a parfaitement raison : éviter de projeter son ego d’écrivain-Bêta en lisant le texte d’un autre est aussi malaisé. C’est pour cela que je suis très admirative de ce type d’exercice, qui demande un sacré talent.

Par ailleurs, être son propre Bêta-lecteur demande du temps, nécessaire pour prendre de la distance. "Patience et longueur de temps…" J’imagine que chacun a déjà vécu ce moment de vertige en reprenant des écrits anciens et en réalisant le progrès accompli… ou le travail d’orfèvre d’un bêta-lecteur attentif !

Publié le 13 Mars 2021

@lamish
Il y a une différence, me semble-t-il, entre répondre et dire n'importe quoi. De toute façon, comme vous n'étiez pas concernée, je me demande de quoi vous vous mêlez entre R. et moi. Vous êtes sa mère ?

Publié le 13 Mars 2021

@lamish. Pas mal du tout, cette classification de mon "œuvre" :-))
Revenons za nos moutons : personnellement, je n'interviens jamais sur le fond d'un texte (à moins bien entendu qu'il y ait des incohérences). En ce moment, je suis justement plongée dans un manuscrit où je relève des faiblesses de construction que je signale à l'auteur, mais c'est surtout sur les incohérences d'écriture que j'interviens. Et là-dessus, il n'y a pas photo : une phrase mal fichue reste une phrase mal fichue, une erreur de vocabulaire doit être signalée, etc. En fait, je m'efforce d'intervenir comme une espèce d'Antidote humain à l'écoute d'un auteur particulier.
Après, il est vrai qu'il faut savoir refréner ses ardeurs et ne pas faire passer ses propres objectifs, fantasmes, standards avant ceux de l'auteur bêta-lu.
Cela revient parfois à "donner sa bénédiction" à des textes qu'on ne publierait jamais s'ils étaient les nôtres. Et c'est là qu'on a souvent des surprises...............

Publié le 13 Mars 2021

@Suzie Phong
Oh Susie Q, Oh Susie Q.
Ainsi donc, Susie, Susie ? Ainsi font-font ? Donc si Phong = Fong et que Feng = Catherine Z / Amalia Rodriguez (j'en passe) X par Porphyre (par exemple). Phong = madame J ??? Et avec ça on douterait encore que la Terre est plate ? Fouchtri de fouchtra, vous m'en direz tant !
(désolée pour les nouveaux venus sur le site, voire les absentéistes)(je ne le referai plus jamais -promis, juré).
Oui, le boulot de bêta-lecteur est épuisant.
Non seulement c'est chronophage en diable, mais c'est de l'équilibrisme. Deviner ce qu'il faut toucher dans un texte pour le perfectionner et parfois le révéler; ne rien toucher à ce qui fait son originalité, quand bien même cette originalité peut sembler une hérésie... C'est un exercice de haute voltige.
Au final, c'est à l'auteur de réagir, de comprendre, de prendre ou de laisser.
Et dans ce tour de passe-passe périlleux, l'un et l'autre (l'auteur et le bêta-lecteur) toujours prêts à se froisser.
Avec le recul, je dirais qu'être bêta-lu est une expérience, un passage obligé dans une trajectoire d'écriviste. C'est le moment dans lequel on peut apprendre, saisir quelque chose. L'ego ne devrait avoir aucune place dans l'exercice, mais trop souvent les auteurs entrent en symbiose avec leur texte. Combien de fois j'ai entendu dans la bouche d'un auteur une expression comme : "je me suis fait descendre par... ". Dans un cadre de confiance (je dirais, de "contrat respectueux"), la bêta-lecture est l'équivalent d'un cabinet de réflexion.
Alors, hein... Well, say that you'll be true and never leave me blue, Susie Q.

Publié le 13 Mars 2021

Hou, la vache ! @lamish, @Hubert Letiers, @Kroussar, vous étiez dans les starting-blocks, ou bien ? C'est quoi ce burn ?
@lamish. Oui, oui... sous l'harmonie, le volcan. Ces rapports harmonieux, ils se construisent... et pas que dans la joie. En tout cas, pas seulement dans la joie. Toutes les émotions y passent et nous passent à la moulinette. Tout est basé sur la confiance (on se croirait dans un pari Pascalien), il faut -au moins l'espace d'un instant- imaginer que l'intention de l'autre est sincère. Ne pas se penser grenouille ni voir dans le bêta un potentiel scorpion; accepter de traverser la rivière ensemble. C'est loin d'être aussi facile qu'on pourrait le penser, et j'espère que d'autres auteurs viendront en témoigner.
Toi, @Hubert Letiers, tu l'as échappé belle ! Je n'ai pas l'impression que tu réalises... Finalement, ils sont pas couillons les bêta-lecteurs qui restent planqués derrière un anonymat aux dimensions de la muraille de Chine. Au moins, ils sont sûrs de ne pas craindre les représailles (appartement plastiqué et tout le toutim)... Bon, ceci dit, ils n'auront pas non plus droit à l'amour qui découle d'une amitié moulée dans le monde réel. Mais comme on dit... "C'est vous qui voyez... y en a qui ont essayé...". A tout de suite pour de nouvelles zaventures !
@Koukrou. Dis-donc, l'ami, tu carbures à quoi dans tes rizières ? Grands écrivains ? Consécration ? Et la postérité, alors, quoi que t'en fais ? Tu me connais depuis pas mal de temps déjà et tu sais quelles sont mes motivations et mes valeurs, rien à voir avec la renommée.
Cela dit, il me semble important de bien comprendre l'époque dans laquelle nous vivons et qui n'a plus rien à voir avec le temps que des gens de nos âges ont traversé (chaque jour notre modèle du monde prend de la bouteille).
Les jeunes auteurs qui écrivent dans l'espoir de vendre des livres devraient selon moi bien choisir leur bêta-lecteurs, lesquels n'auront certainement rien à voir avec ceux dont on parle dans cette tribune. Il leur faut des coachs non en littérature, mais en marketwriting. Et ceci est une autre aventure.

Publié le 13 Mars 2021

Un parcours que de grands écrivains ont probablement suivi avant la consécration de leur œuvre. Un parcours du combattant, qui rappelle que sans coaching, rien n'est possible. Combien d'écrivains se sont entourés de pairs ou d'amis littéraires ? Presque tous !
Ce que l'on peut (doit ?) retenir de ce retour d'expérience, c'est que le bêta-lecteur (pas si bête que cela d'ailleurs) n'est point un simple correcteur d'orthographe, mais bien un briseur de mots ; un défonceur de phrases bancales, un exécuteur de non-sens, un vitrioleur de l'à-peu-près...
/n
Brèfle, comme dit le dit souvent une amie sur ce site, à qui cette tribune rend également hommage, il faut aussi que l'auteur(e) soit prêt(e) à revoir sa copie, sans s'offusquer en son honneur. Et c'est là, que les choses se gâtent. Pourtant, c'est tout l'intérêt de cette plate-forme qui permet de créer des liens entre auteurs(es), de profiter de l'expérience des plus aguerris...
/n
Merci, Catarina, pour cet excellent article.

Publié le 13 Mars 2021