Aldous Huxley : le visionnaire rattrapéEtre visionnaire ne prend de sens que le temps de l’anticipation, car si vos visions se réalisent, elles deviennent un simple récit. En caricaturant un peu, c’es l’image projetée d’Aldous Huxley. D'avant garde et frondeur hier, ses propos sont aujourd'hui entendus et intégrés.Le genre même de la Science fiction est dépassé par ses formes variées : fantasy, fantastique, utopie... Bien différent, des auteurs comme
Huxley : Le visionnaire rattrapé
Dans Le meilleur des mondes, Aldous Huxley est considéré dans un premier temps comme un dangereux penseur car son livre s’attaque à la famille et à la religion, L'auteur anéantit l’individu comme penseur autonome pour le soumettre à une puissance supérieure collective.
La natalité est sous contrôle des scientifiques et dessine ainsi une société eugéniste. L’ensemble des recherches (biologiques, génétiques) et des pratiques (morales, sociales) ont pour but d’établir les conditions les plus favorables à la procréation de sujets sains et, par là même, d'améliorer la race humaine.
On connait bien, le concept de contrôle des naissances, de reconnaissance digitale, de surhomme tristement porté en idéologie dans un monde scindé qui sépare surhomme et masse. L'excellence du premier, n'ayant pour égal que la déchéance du second.
Le succès et la résonance de « Brave new World » est la dénonciation sans ambiguïté d’une Société de consommation, d’une forme de communisme triste et mécanique de développement technologique exponentiel
En préfigurant les totalitarismes, il a montré avant l’heure en quoi le scientisme aveugle ne pouvait mener qu’au désastre.
Son génie vient aussi de la date de ses écrits 1932. il aborde les thèmes de la dictature, du clonage, de la taylorisation, de l'aseptisation de notre société... Un roman surprenant d'actualité, car écrit avant l'arrivée au pouvoir du nazisme.
Aujourd’hui les technologies décrites sont quelques peu dépassées. En particulier l’utilisation intensive de la génétique peut paraitre presque simple face aux chemins dessinés par l’IA.
Si la crainte du totalitarisme et de l’uniformisation culturelle restent des préoccupations clefs, les questions centrales pour nous aujourd'hui de la surveillance numérique, de l’intimité de l’individu et de la révolution climatique sont à peine abordées. Les rapports de genre ne sont pas traités alors qu' ils sont au centre des questions sociétales d’aujourd’hui.
Le meilleur des mondes manque d'une dimension holistique pour être une œuvre parfaitement visionnaire.
Certaines réflexions sont datées et le confine dans une fiction excessivement sombre de l’humanité avec peu de liens sur les premices du futur.
Le profond engagement avec les questions sociales, politiques et philosophiques de son époque, valides encore aujourd’hui ne masque pas une forme un peu surannée qui a du mal à faire mouche aujourd'hui.
Roger Martin du Gard : un humaniste minutieux
Remarqué par André Gide chez Gallimard "Jean Barois" (1913) qui traite de l’affaire Dreyfus, l’une des prermières œuvres de Roger Martin du Gard permet aux deux auteurs de nouer une amitié progressive et solide à travers des échanges épistolaires sur leurs conceptions propres de la littérature.
Roger Martin du Gard peut être considéré comme l’un des inspitateurs du nouveau roman. En tant que narrateur, l’auteur porte peu de jugement et reste neutre e objectif quant à l’appréciation des choses. Il porte un grand intérêt aux descriptions minutieuses des personnages et des lieux, et ce au détriment d’une avancée du récit minutieuses. Il y a peu de descriptions psychologiques détaillées.
A l’inverse la recherche documentaire est approfondie. La reconstitution historique est l’une de ses passions
L'Histoire avec un grand H est le maillon central de l'œuvre de Roger Martin du Gard. Après avoir traité de l'affaire Dreyfus dans "Jean Barois", le romancier, etudie les étapes et les mécanismes de la guerre que connaît l'Europe avant 1914.
C'est en 1937,que R. Martin du Gard se voit attribuer le prix Nobel de littérature
À son retour de la guerre, il s'isole à Clermont où il va stocker des notes et plans pour le roman saga de sa vie : les Thibault, « l'histoire de deux frères, deux êtres de tempéraments divergents, mais marqués par les fatales similitudes de leur sang :t. Pendant près de 20 ansson temps sera consacré à ce projet qui le tiendra loin de Paris. De22 à 30, il fera paraitre Le Cahier gris et Le Pénitencier (1922), La Belle Saison (1923), La Consultation et La Sorellina (1928), La Mort du père (1929).
Roger Martin du Gard se caractérise par un style détaillé et réaliste. Il s’attache à écrire avec minutie les évènements, les personnages, les environnements, ce qui peut sembler laborieux pour ceux qui aiment un style dynamique et des intrigues enlevées.
La série des Thibault explore en profondeur la vie bourgeoise et les conflits familiaux, examine à la loupe les dilemmes moraux et relations personnelles avant et pendant la 1 ere guerre mondiale
Mais face à Gide, face à Proust, face à Sartre, ses contemporains, la pensée philosophique parait moins novatrice, moins dérangeante, plus conventionnelle, moins aspirationnelle.
Alors qu’on étudie Gide encore dont les idées se réincarnent sans cesse dans une forme de modernité qui influe sur la littérature contemporaine, Roger Martin du Gard est sorti des programmes éducatifs et sa longue saga des 5 Thibault semble un peu immobile et figé, comme un simple repère dans la littérature du XIX ème siècle.
Depuis les techniques narratives ont changé, les langages et le jeu de la subjectivité sont le terrain des nouveaux écrivains…
Roger Martin du Gard reste seul : très classique et conventionnel
Cela ne diminue rien au valeur historique et littéraire de son œuvre.
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Les politiques eugénistes, prônant la stérilisation et des restrictions en matière d'immigration, ont vu le jour dès la fin du XIXe aux États-Unis : premières stérilisations en Indiana en 1890 et, en 1907, loi pour le stérilisation des "faibles d'esprits" et des crimininels votée dans 33 états.
Cette loi a reçu un écho favorable dans le monde anglo-saxon cultivé, et cette politique a été appliquée dans certains pays européens dès 1920 (en Suède, de 1935 à 1976). Le sujet reste très tabou, mais s'il était question d'empêcher la reproduction des êtres dits inférieurs en leur interdisant le mariage et en les stérilisant, il n'était pas question d'extermination, comme ce fut le cas en Allemagne nazie.
Tout cela pour dire que Huxley, en observateur bien informé, nous a alarmés en imaginant un monde issu de diverses dérives sociétales possibles, comme les auteurs actuels en imaginent face à l'avènement de l'IA, ou d'autres en réaction au réchauffement climatique...
Une chose est sûre, son message est et sera toujours d'actualité (notre Ford, notre Freud..., excellent, tout de même :-) ! ).
Merci pour ce billet. Amicalement,
Michèle
PS : la castration chimique se pratiquait couramment, lorsque je bossais en HP, et cela reste un sujet largement débattu de nos jours face à la délinquance sexuelle.
Je n'ai jamais accroché à Martin du Gard !
Pour Huxley, en revanche c'est scandaleux !
C'est un immense génie !
Jai lu avec attention votre article. Je ne pense pas que Brave new world, écrit par Aldous Huxley ,soit un ouvrage oublié. Cela dit je pense que l'auteur fait référence au totalitarisme communiste. Dans l'ouvrage une race d'esclaves est créée à des fins économiques. L'auteur est visionnaire car il dépeint davantage notre démocratie pervertie d'aujourd'hui: procréation assistée, le sexe et non l'amour, la contraception facilitée, l'uniformisation de la culture et des hommes fabriqués sur un même modèle. En revanche le Nazisme prônait la famille et l'entreprenariat. @Sylvie de Tauriac
On associe souvent eugénisme et nazisme. Et, à ce titre, on loue davantage encore le génie prémonitoire de Aldous Huxley, de par le fait que "Le Meilleur des mondes" a été publié en 1932. Sauf que si le fantasme de la « race pure » est bien à rattacher au nazisme, les théories et les pratiques eugénistes lui sont antérieures. Il suffit de se rappeler l’eugénisme scandinave des années 1920-1970 où la castration et la stérilisation (par salpingectomie et vasectomie, deux techniques perfectionnées au cours des années 1890-1900) étaient des pratiques courantes inscrites dans la loi. La distinction que d’aucuns ont voulu faire entre le caractère « volontaire » de l’eugénisme nordique et au contraire « forcé » sous le régime nazi est en grande partie fallacieuse : dans les pays scandinaves, les victimes étaient en premier lieu les handicapés mentaux. Et les femmes !
@vous auteur-e. je ne crois pas que Huxley soit oublié, au contraire. Et de même Roger Martin du Gard. Tes d'été : lorsqu'il est dans une bibliothèque familiale, les mômes et jeunes qui lisent vont le pêcher : tous ces volumes ! (Pour RMG) ça attire l'oeil ; et Huxley idem...