Au début de l’année 2016, je me suis fixé comme challenge l’écriture d’une nouvelle par semaine. J’ai appris depuis, grâce à Dali Valpogne « Le dédain en petite culotte » sur mBS que ce genre d’exercice s’appelait un « défi Bradbury », du nom de l’auteur de « Farenheit 451 ».
J’ai la chance d’avoir une imagination débordante et j’avais aussi quatre ou cinq projets de nouvelles en cours d’écriture. Ce qui constituait un petit capital de départ. Les premières semaines se sont écoulées sans problème. J’étais dans la position du lièvre face à la tortue, alors j’ai musardé, procrastiné, tergiversé, tant et si bien que mon « avance » a très vite fondu comme neige au soleil. Il m’a fallu alors écrire en flux tendu. C’est à ce moment que l’exercice a pris tout son sel !
La plus grande difficulté à mon avis est de ne pas écrire deux fois la même nouvelle, je refoule beaucoup de projets car trop proche d’un thème déjà abordé. Par exemple, dans « Le grand méchant Lou et les trois petites cochonnes » qui est dans la même veine que « Il était une fois » j’ai considéré que c’était une facilité que je ne devais pas m’accorder et cette nouvelle reste pour le moment sur mon disque dur. Donc de semaines en semaines, le champ des possibles se restreint …
Un autre obstacle pour mener à bien ce genre d’exercice est le temps. Je gère de front mon travail, ma famille (nombreuse) ainsi qu’une grosse activité sportive et associative. Merci au passage à mes périodes d’insomnie qui arrivent à me procurer du temps d’écriture. En effectuant le décompte, je suis actuellement à 34 nouvelles postées et nous sommes, quand j’écris ces lignes, semaine 39, donc un « retard » de 5 nouvelles, je ne sais pas si je vais réussir à le combler avant la fin de l’année.
Concernant mon rythme d’écriture, une fois l’idée trouvée, je note pas mal de phrases dans mon joli cahier vert et ensuite vient le temps des recherches et des vérifications afin de ne pas trop écrire d’âneries. Même quand j’écris des « bêtises », j’essaye la plupart du temps d’avoir une cohérence et un respect des lieux, des faits et des époques. L’écriture proprement dite est assez rapide car à ce stade le plan complet est déjà dans ma tête. Ensuite les corrections, mon épouse et mon amie Chantal excellentes en orthographe m’évitent de passer pour un cancre. Mon épouse est aussi ma première lectrice, elle me fait quelquefois des remarques sur la fluidité d’un passage, ou la pertinence d’un terme. Elle se permet même, l’effrontée, d’émettre des avis sur le style employé !!! Je conteste avec véhémence ses arguments en la renvoyant à son aspirateur. Ensuite, quand elle a le dos tourné, j’applique ses remarques toujours judicieuses.
Quelque soit le nombre de nouvelles que j’aurais écrites d’ici la fin de l’année, je retiendrai de cet exercice le plaisir d’écrire ainsi que la fidélité et la bienveillance des lecteurs de mBS. C’est un réel bonheur de se savoir lu et encouragé par des commentaires toujours sympathiques. Grâce à ce défi, je me découvre avec étonnement : je me glisse souvent dans la peau de personnages féminins, la mort revient comme un thème récurrent dans beaucoup de mes histoires, je nomme très rarement mes personnages ?! Concernant le style, il devient vite urgent dans ce genre d’exercice d’aller à l’essentiel, donc on se débarrasse des fioritures et du superflu. J’ai constaté que j’ai beaucoup moins besoin d’effectuer des coupes dans mes premiers jets.
Je ne vous cache pas que je suis quasiment vidé en cette fin d’année. J’ai l’impression d’être un grenier que l’on vient de débarrasser de millions de choses entassées depuis des lustres. Je ne sais pas si j’ai « réussi » ou « raté » quelque chose avec ce challenge, mais je suis sûr de m’être bien amusé.
Pour clore ce petit article, Ray Bradbury a dit lors d’une conférence : “Écrire un roman, c’est compliqué: vous pouvez passer un an, peut-être plus, sur quelque chose qui au final, sera raté. Écrivez des histoires courtes, une par semaine. Ainsi vous apprendrez votre métier d’écrivain. Au bout d’un an, vous aurez la joie d’avoir accompli quelque chose : vous aurez entre les mains 52 histoires courtes. Et je vous mets au défi d’en écrire 52 mauvaises. C’est impossible.”
Si je devais n’en retenir qu’une, ce serait « Tako tsubo ». Noire, tendue, brûlante et désespérée. Ma préférée.
Vous avez écrit un livre : un roman, un essai, des poèmes… Il traine dans un tiroir.
Publiez-le sans frais, partagez-le, faites le lire et profitez des avis et des commentaires de lecteurs objectifs…
@hermann Sboniek. Oui, vous savez que je plaisante beaucoup sur ce métier d'écrivain, mais je ne m'en moque pas. Parce que si nous faisons partie de la communauté de mBS, c'est bien que nous y croyons un peu, tout de même. Quand je vais en librairie et que je contemple ces monceaux de livres qui vont aller tout droit au pilon, je suis bien content de ne pas en être. On écrit toujours pour des raisons obscures, mais aussi pour une raison bien précise : être lu. Cela aide à vivre, indubitablement. Toutes les méthodes sont valables, et chacun s'en invente une. La vôtre est courageuse, indéniablement. Le résultat se passe aisément de commentaire. Mais comme vous avez, entre autres, ceux de lamish, comme moi, nous sommes les plus heureux des hommes. N'est-ce pas, @lamish ?
@Yannick A. R. FRADIN merci de ce commentaire En cette fin d'année, je commence beaucoup de nouvelles et en fini peu, serais-je en train de devenir exigeant ?? Le chiffre de 52 n'est pas une fin en soi, je sais que je ne l'atteindrai probablement pas, ce n'est pas grave, e plaisir d'écrire est toujours présent. (PS j'ai aussi longtemps pratiqué l'Aïkido )
@BOSSY je comprends ce que vous décrivez, j'ai le même sentiment sur des textes déjà postés il y a longtemps. J'aurais bien envie de les supprimer et de les mettre à la corbeille. Je résiste à cette envie et je les garde. Une fois que l'on a décidé de mettre en ligne (faire lire) ses textes, ils nous appartiennent alors beaucoup moins, donc je n'y touche plus. Concernant cette tribune que mBS m'a gentiment proposé, je trouve que le titre qu'ils ont choisi est un peu "décalé", car il inclut une notion de compétition qui ne correspond pas tout à fait à mon projet. Quand j'ai commencé, je me suis dit que c'était une façon originale de créer le "buzz" autour de mes autres textes et ainsi de sortir de l'anonymat au milieu des nombreux auteurs de ce site.
A la fin de cette année, grâce à cet exercice, j'espère bien atteindre le statut de débutant.
Nous sommes tous admirables pour avoir osé écrire et osé se laisser lire.
@hermann Sboniek. Je n'ai pas la prétention d'être un écrivain et ne m'aventurerai pas à apprendre le métier. Vous tirez à la mitrailleuse quand, muni de mon arc et de quelques flèches, je rate ma cible régulièrement. Je change d'arc et de flèches : pareil ! Alors, je déplace la cible : pareil ! Quand j'écris 4 pages format A4 ( équivalent d'une nouvelle ) que je contemple la semaine suivante, je ne les poste pas, je les déchire. Alors, je monte au grenier. Figurez-vous qu'il est vide ! ( évidemment ). Je redescends et reprends une nouvelle feuille , que je remplis en tirant la langue. Comme la vôtre, ma femme corrige les fautes de syntaxe et d'orthographe. La semaine suivante, je sors la feuille de mon tiroir et je raye la moitié du texte. De ce qui reste, je change au moins dix mots, repousse les virgules, ajoute quelques points. Ce n'est guère mieux, mais il faut bien que j'avance dans mon roman. Et je me dis qu'il n'est plus temps d'être un écrivain. Alors, la rage me prend. J'attrape deux cents feuilles A4 et quatre crayons, je gribouille à toute vitesse tout ce qui me passe par la tête. Cela exige trois ou quatre mois. Et je poste ! Eh bien, le croiriez-vous ?, j'ai au moins quatre ou cinq commentaires qui me disent que c'est superbe. Je n'en crois rien, mais je dis merci, bien sûr. Il n'en reste pas moins que je ne suis pas un écrivain. Et cela n'a aucune importance.
C'est pourquoi je vous admire.
Bonjour @Hermann Sboniek et merci pour cette tribune sympathique. Une nouvelle par semaine, joli challenge ! Même si vous n'arrivez pas à 52 au bout de l'année, vous en aurez tout de même rédigé un certain nombre (au moins 34 :p) et vous serez bien amusé, ce qui reste très important. Et puis, "s'astreindre" à une telle régularité ne peut être que bénéfique pour gagner en aisance et en efficacité. Je n'ai encore rien lu de vous sur mBS, gloups ! Pourtant, j'ai vu votre nom passer régulièrement au fil des commentaires. Allez zou, je file jeter un oeil et mettre quelque chose dans ma BV, comme ça je vous découvrirai une fois mes lectures en cours terminées :-)
@Marguerite Rothe vous faites partie des lectrices dont les commentaires réguliers me ravissent, Merci d'être encore présente ici.
@Colette Bacro Je ne peux malheureusement pas faire autrement (Pour mon épouse) elle est commerciale chez Electrolux !!!! Et moi directeur du marketing chez Heineken !!!! Plus sérieusement, soyez assurée que la parité règne chez nous. Comme je le disait ailleurs à Lamish, j'ai bien trop de pudeur pour écrire autre chose que des mensonges.
@lamish bravo à vous pour vos lectures, vos commentaires et pour la vie que vous donnez à ce site.
@Catarina Viti merci pour votre conseil de lecture, j'ai bientôt fini "La contesse de ricotta" et je me régale avec le style de Miléna Agus (Quand le requin dort est en commande)
@Elen Brig Koridwen Je n'ai pas fini de vider totalement mon "grenier" que déjà j'entrepose des bricoles dans la partie récement libérée perpétrant ainsi le mythe de Sisyphe ...
@Corinne Le Gal promis, 2017 sera consacrée à un roman, et puis il faut que je finisse "Dommage Eliane"
@Vous toutes ( où sont les males ??) tous mes remerciements.
@ Chapeau Hermann pour vous être lancé un tel défi — pour ma part insurmontable — et tenter coute que coute de le relever malgré vos obligations professionnelles, familiales, parentales, conjugales, extraconjugales, amicales, estivales, sportives, extravagantes, illicites… Quelle prouesse ! Car tout ce que vous nous avez proposé jusqu’à présent est parfaitement cohérent et digne de ce que l’on attend d’un véritable écrivain : une histoire intéressante et bien écrite. J’ai ri souvent, été émue parfois, me suis régalée tout le temps. Qu’importe si vous ne réussissez pas à créer 52 nouvelles d’ici la fin de Décembre. Certains de vos textes en valent bien deux, tant par leur longueur que par leur originalité. Vous avez toute mon admiration bien évidemment. Et mon respect. Vous méritez totalement votre place parmi les auteurs du XXIème siècle. Vous êtes fin prêt pour nous concocter une pépite de… disons, 500 pages ? Allez Hermann, vous en êtes tout à fait capable. Amitiés. Corinne.
@Hermann Sboniek
Intéressant témoignage d'un défi qui exige du souffle et de la constance. Quel que soit le nombre de nouvelles écrites en fin d'année, vous aurez démontré, et ce n'est jamais inutile, que l'écriture est aussi une discipline, pas seulement de l'inspiration. Bravo ! J'admire votre constance. Et j'adore votre métaphore du grenier : elle me parle particulièrement, à moi qui je me suis donné pour tâche de publier tous mes fonds de tiroirs et de transformer mes notes et ébauches en nouvelles, voire plus si affinités (mais je suis moins assidue, plus dispersée que vous ; je vais m'efforcer de vous prendre pour exemple !). Vous avez raison, nous sommes tous un grenier empli d'objets aptes à faire le bonheur de tel ou tel lecteur. Alors, merci d'avoir entrepris de vider le vôtre à notre profit...
Amicalement,
Elen
Merci Hermann pour ce beau "papier" tout en sincérité. Trop infidèle (j'ai toujours plein d'autres trucs à lire) pour être comptée parmi vos lecteurs assidus, je n'en suis pas moins un très grande admiratrice de vos écrits. C'est que j'aime le style Sboniek, voyez-vous. Continuez de nous régaler cher Hermann, il y a tant de plaisir à vous lire. Bien à vous, et bien amicalement, si je puis me permettre. Marguerite.