Actualité
Le 29 jui 2022

Internet et l'auto-édition

"L'ère du digital déverse sur nos écrans des milliers d'écrits auto-édités de mauvaise qualité dont on se passerait bien" disent beaucoup, mais n'est-ce pas là, au contraire, une opportunité rare de découvrir le vrai état de la production littéraire, pour le meilleur et pour le pire. Avec un peu de courage, parfois, certes...
Vivre à l'heure du digital pour un auto-édité est une grande opportunitéVivre à l'heure du digital pour un auto-édité est une grande opportunité

Des bienfaits d'internet sur le monde de l'auto-édition

Derrière les propos de Catarina Viti Lire de mauvais livre pour se donner la chance d’être un bon auteur, (pas un article, une opinion nous dira son auteure), je vois un plaidoyer habile et périlleux sur la force d’internet dans le domaine culturel au sens large.
La profusion n'est pas un mal en soi, elle permet de se placer, de s'auto-évaluer versus le niveau moyen de la production d'écrits et donc d'avoir un regard peut-être plus objectif sur son propre travail. A la condition, et à la seule condition de regarder ce que font les autres.
Permettre à chacun de s’exprimer d’exposer son travail, ses opinions, son ouvrage implique aussi de permettre à d'autres (de nature altruistes) de s’articuler autour de leur travail comme (gentils mais objectifs) critiques, comme conseil et comme soutien.

En un mot, naviguer sur internet est aussi une œuvre de solidarité et de soutien qui permet de s’enrichir soi-même et qui, par ailleurs, ne nous met pas à l'abri de découvrir une bonne oeuvre.
Il y a bien sûr dans la fraîcheur et la fragilité de ces raisonnements, une audace d’opinion.
Mais on aime les avocats du Diable et les causes en danger. On aime donc Catarina Viti.

Internet n’est pas la bible de ceux qui "savent" ou recherchent la vérité

La réponse amicale d'un auteur que je ne peux plus citer (car il a retiré son texte) est, elle, plus sûre, mais elle emprunte aussi les voies les plus évidentes, apparemment plus incontestables. Pourtant les vérités premières peuvent parfois conduire à des certitudes enfermantes. (La rubrique lui est bien sûr ouverte.)

En développant un classique mais (brillant) parallèle entre la nature et la culture. On comprend mécaniquement l'issue du raisonnement.
La nature laisse les plus forts, les plus "grandes gueules", et les plus brutaux s’emparer du pouvoir.
(En un mot, internet laisse les fortes têtes, les plus bavards crier plus fort que les autres).
En conséquence, cela ne privilégierait pas la voix de ceux qui raisonnent, cela ne favoriserait pas la culture posée et construite, les modérés.
(En un mot internet n'impose pas les normes de la qualité, du bien et du mal, du bon et du mauvais, des normes académiques d'intellectuels, de professeurs, de journalistes traditionnels comme elle devrait)

Aux internautes, (pour des sites comme le nôtre), « On fait croire aux auteurs qu’ils sont le centre du monde, on starise l’individu, on fabrique de l’insignifiance, on exploite de façon gracieuse la fatuité des faux génies" pourrait-on ajouter

C'est sans doute partiellement vrai. Mais dire cela, c’est oublier qu’Internet n’est pas la bible de ceux qui savent, recherchent la vérité ou la perfection.
Ne soyons pas naïfs, tous les "mauvais" prendront un jour la mesure de ce qu'ils sont, vraiment. Mauvais.

Internet n'est qu'un outil d'ouverture et de propositions. Il ne décidera pas de la bonne ou de la mauvaise littérature

Internet est aussi un stimulateur d’esprit critique, une source d’information dont chacun doit se méfier. Il y a un mode d’emploi, un mode d’emploi propre à chacun. L'outrance, la caricature de cet outil nous permet de nous en méfier de façon élémentaire, de s'articuler, de penser...
Les croyances et les mauvais récits et écrits populaires ont toujours existé. Ils sont aujourd’hui rendus publics par internet (comme tout).
Et ce n’est pas un mal (c’est en tout cas édifiant) de les entendre. Nous sommes responsables de ce que nous écrivons, de ce que nous lisons, de ce que nous pensons, de ce que nous évaluons, quelle qu’en soit la source.

Internet ? Quelle levée fantastique de frustrations, regardez qui s’exprime ne serait-ce que "dans la goutte monBestSeller de l’océan internet." Il y a là du bon, du mauvais, une volonté des auteurs de se confronter mais en tout cas un canal formidable d’expression dans un monde qui semble si oppressant à beaucoup.
Gageons que quelques talents, quelques bonnes idées seront révélés ne serait-ce qu’à travers ces débats.

Internet, c'est l'inverse d'un manuel d'école

’Internet dans l’espace culturel, ce n’est pas une référence académique, ce n’est pas un modèle de ce qui est bien ou qui ne l’est pas… C’est un grand marché aux puces, un grand espace d’expression ou chacun se doit de faire le tri, de faire sa sélection, de croire ce qu’il pense être juste, de développer sa personnalité, de forger son opinion, de vérifier…en bref de se comporter en adulte.

Est-ce un mal de rendre les gens responsables de ce qu’ils pensent, de ce qu'ils écrivent, des lieux et de la fiabilité de leurs sources ?

Internet, C’est l’inverse d’un manuel d’école. 
Mais cet espace, avec tous les risques qu'il comporte est aussi réservé à « ceux qui pensent bien ». On peut s’y prévaloir d’une expérience ou d’une connaissance.
Le bon d'Internet aura son public.

Ce n'est pas un site qui peut cautionner la qualité d'un ouvrage, ce sont les lecteurs et les éditeurs

Chez monBestSeller, on ne fait pas croire aux gens qu'ils sont « écrivains ou auteurs" , on expose simplement leur travail, et quand l’auteur s’expose il prend ses risques et il le sait.
Quand on montre volontairement son ouvrage, on doit subir la vindicte populaire. Et c'est souvent un dur retour à la réalité.
Car Internet est un outil aussi pour nous dire de difficiles vérités. Avec Droit de réponse, néanmoins.

Eh oui, on n’a pas besoin d’être Matisse pour peindre, pas besoin d’être Rodin pour sculpter, et pas besoin d’être Flaubert pour écrire…
Pourquoi professionnaliser tout, pourquoi tout modéliser ?
Et d'ailleurs la question n'est plus là, nous vivons le siècle du digital. La question n'est pas de savoir si c'est bien ou mal, la question est de savoir comment en faire le meilleur usage.

Combien de Flaubert ont-été enterrés dans l'anonymat ?

Et puis d’ailleurs on pourrait inverser le propos, combien de Flaubert ont été enterrés, combien de du Bellay ont disparu, combien de grands auteurs ne découvrira-t-on jamais ?
Si internet avait été là il ya quelques siècles, ce serait peut-être moins vrai.
Internet n’est pas un fléau, c’est un outil, un outil dangereux certes. Mais les bons outils sont souvent dangereux, et ils font les bons ouvriers.

Les bons ouvriers sont des gens et parmi eux certains écrivent.
Sur monBestSeller.com, par exemple.

Christophe Lucius

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15 CommentairesAjouter un commentaire

@Kroussar. Mon ami, je découvre ton interpellation (la notification n'a pas été déclenchée).
Il y a des gens, comme toi, qui écrivent pour témoigner de l'Histoire, et d'autres, comme moi, pour se rendre intéressants, sans doute dans l'espoir de colmater un peu leur névrose galopante. Enfin, bref, par effet retour de leur profonde insignifiance.
Ma question de conclusion n'est pas "pourquoi tant de textes", mais "pour quoi tant de textes". Et la réponse est (selon moi) dans l'intervention de @Sofia Kolokolo2 : pour l'espoir de sortir de son trou. Et, malheureusement, toujours en accord avec Guennec, il y a une loi mathématique qui fait que la production dépasse et de très loin la capacité du marché.
De mon point de vue, cela est un état intermédiaire (une crise, si tu préfères, l'état entre deux états). Cette crise va durer encore un peu, puis, comme dans la Nature, quelque chose de plus important que les passe-temps va mettre de l'ordre, un ordre certain et passager avant la reconstitution du chaos.
Toi qui vis les pieds dans les rizières, tu le sais bien : rien ne dure éternellement, et quand un événement se manifeste, il faut envisager son opposé.
Quel est l'opposé de la surproduction ? Voilà. Tu as trouvé.
C'est cette surproduction qui anime chez les uns et les autres ces comportements dont la puanteur sature l'atmosphère. La surproduction implique la "réussite" (concrétisation serait plus juste) d'un très faible nombre et "l'échec" (effacement serait plus juste) de la masse. La seule façon d'en sortir est de se situer en dehors de toute compétition et de travailler. Personnellement, je me bat les flancs et les flans en neige de ce que peuvent dire et penser les Huns et les Autres Augos. On me méprise, on me flatte, on se fout de ma gueule (indirectement, en se gaussant des pauvres masochistes qui transpirent sueur, sang et larmes sur leurs pages tellement quelconques finalement)... qualité, manque de qualité, inspiration ou pas, textes dépressifs, trop noirs ou trop ch'sais pas quoi... Quelle importance tout cela ? Ce qu'il faut, c'est tenir, continuer, agir, être dans l'action, se tenir droit dans ses bottes, sans craintes et sans illusions "faire sans faire", faire surtout sans sentiments associés. Bref, appliquer la bonne vieille Tradition taoïste. Et quand tous les auteurs (les bons et les bonnes et les mauvais, et même ceux à chier) se seront regardés dans leur beau miroir et auront franchement répondu à la question "pour quoi", il n'y aura plus lieu de discutailler.
Mais, évidemment, il faudra alors faire face à....................
l'ennui.
Je t'embrasse, beau brun.

Publié le 10 Août 2022

Merci pour ce commentaire éclairé. Il y a tant de choses qui me paraissent vraies !

Publié le 06 Août 2022

Internet, c'est l'inverse d'un manuel d'école.

Et c'est tant mieux. Car depuis de nombreuses années, entre "Histoire et Vérité", c'est une quête sans fin.

De mon point de vue, les manuels d'écoles s'apparentent plus à des grimoires sacrés où seule une part de vérité, la moins gênante, est révélée. Grâce à Internet on peut trouver plus d'informations et en les recoupant, on peut compléter les manques, se faire une idée et, enfin, se rapprocher de la vérité historique.

Honoré de Balzac, dans « les illusions perdues », avait raison d’affirmer : il y a toujours deux histoires : L’histoire officielle, menteuse ; L’histoire secrète, où sont les véritables causes des événements. Tout ce qui est intéressant se passe dans l’ombre, et on ne sait rien de la véritable histoire, ni des hommes qui la falsifient, ni du mépris des grandes puissances qui ne peuvent penser au peuple que par intérêt ou sadisme.

@Catarina Viti
nous propose cette réflexion : Pourquoi AUTANT de textes ? Pourquoi à une époque où de moins en moins de gens lisent nous avons de plus en plus de textes en circulation.
La voilà, l'énigme. Pourquoi, ou même pour quoi, écrivons-nous autant ?
Soyons plus spécifique : pourquoi publions-nous autant ?

Et bien, modestement, je crois que chacun d'entre nous a quelque chose à partager ; que ce soient des drames, du vécu, de la souffrance, de l'amour, de l'humour aussi et c'est tant mieux. Mais tous ces petits morceaux de vies nous permettent de réfléchir et, parfois, de trouver l'information manquante.

Je pourrais même ajouter, que mon témoignage en est la preuve démontrée.
Bien Amicalement,

Publié le 06 Août 2022

Écrire et publier, c'est dire. Lire, c'est se laisser emporter par une histoire ou réfléchir sur un texte, et pouvoir en discuter avec son auteur (privilège que nous offre Internet).

À lire ces billevesées (qu'il me faudrait un traducteur pour les comprendre), j'en conclus, qu'ici, seule une petite poignée d'inscrits savent écrire, maîtrisent parfaitement notre langue et évitent ses chausse-trappes. C'est bien beau tout ça, encore faut-il savoir raconter ! De fait, je remarque (je pense ne pas être la seule) que les centaines d'autres membres de notre communauté sont traités tels des paillassons sur lesquels les érudits s'essuient allègrement les pieds. C'est sympa de se voir traités de nullités ! Oui,@Philippe De Vos, ici, certains ne veulent pas mélanger les torchons et les serviettes. Pourtant... que de belles rencontres nous faisons sur mBS, dont une nous a tiré les larmes cette semaine !

Et pour rejoindre le contenu de la tribune, j'affirme que CHACUN d'entre nous a ENCORE LE DROIT d'écrire, de publier, voire s'auto-éditer et que dans chaque écrit se trouve un humain !

Publié le 05 Août 2022

@Lucas Belmont
C'est vrai, Lucas : en littérature, il est plus difficile de trouver des ânes qui donneraient le change. Mais avouez quand même que certains nous ramènent à cet état d'âne (au sens figuré et sans état d'âme) et nous dénient le droit d'écrire… de publier ici même sur mBS, site conçu à cet effet, justement ! C'est même sa profession de foi, non ?
Me revient en tête une réponse de Christophe Lucius qu'il m'avait faite sur l'une de mes remarques dans un commentaire (en 2017). Il écrivait : "Je serais prêt à publier même votre liste de courses", ne laissant ainsi plus de doute sur le but du site : tout publier, hormis ce qui est réprimé par ses CGU.

Publié le 05 Août 2022

Comme nous sommes d'accord et j'apprécie la finesse de votre analyse... Une oeuvre d'art n'est que la projection du regard des autres, sous l'influence des paramètres culturels existants.
Bonne journée à vous !

Publié le 04 Août 2022

@JOHANNELLE
Non, l'âne n'a pas cette conscience. Et d'ailleurs, il n'a pas fait acte de création en saisissant le pinceau que lui tend son maître. Il barbouille. C'est ensuite que la chose devient ou non œuvre d'art. Lorsqu'elle lui échappe. Et aussi lorsque le "grand public" se précipite en masse pour admirer (ou pas). Ce qui ne signifie pas que ce "grand public" ait un goût sûr, éclairé. Il réagit !
Et dans cette histoire, le public a une réaction… On peut imaginer qu'il a été conquis par des couleurs vives, couleurs que l'âne n'a pas choisies. Il y a donc un peu de la volonté du maître (ou pur hasard).
C'est après que l'on se décide à donner du sens à tout cela. La toile ne deviendra œuvre d'art qu'après analyses et débats.

Publié le 04 Août 2022

Quelle jolie anecdote ! Moi, ce que j'en retire, c'est que ce n'est pas uniquement avec la conscience du beau et du laid qu'une oeuvre peut naître... En tous les cas, l'âne ne l'a pas !

Publié le 03 Août 2022

@Frieda Pouffe
Si c'est ce que vous avez lu, alors vous avez mal lu !
De cette morale, il ne faut pas en tirer que c'est à la gloire de la bêtise, même s'il y a un âne, c'est l'espérance de la tolérance et de la modestie.
C'est aussi l'oeuvre qui n'est œuvre d'art que dans l'œil de l'autre etc.
Pour le reste : mieux vaut-il être riche que pauvre ? En bonne santé que malade ? Beau que laid ? Cultivé qu'un âne ? Certainement. Mais tout cela ne donne pas le talent qui est affaire de sensibilité.
Me semble-t-il !

Publié le 03 Août 2022

@Catarina Viti
Son agent s'en est chargé !

Publié le 03 Août 2022

@Philippe De Vos. Finalement, est-ce que l'âne a empoché les 500€ en bon d'achat ?

Publié le 03 Août 2022

@Frieda Pouffe
Tout est dans le texte !

Publié le 03 Août 2022

Imaginons un petit village où un habitant aurait l’idée saugrenue d’organiser une exposition de peinture. Il fait le tour du village, toque aux portes pour voir si, par hasard, il n’y aurait pas quelques peintres du dimanche et découvre que finalement, oui, il y en a quelques-uns qui s’adonnent au plaisir de barbouiller. Certains font de l’aquarelle, d’autres de la peinture à l’huile, d’autres de la gouache, d’autres des dessins, du pastel… Certains aiment peindre le village, d’autres des natures mortes, d’autres, même si on n’est pas en bord de mer, peignent des marines ; il y a aussi les portraitistes, des néo-cubistes, des néo-impressionnistes… Bref ! Faisant le tour de son village, l’habitant découvre un foisonnement de couleurs et de formes qui l’enthousiasment. Certes, beaucoup ne savent pas ce qu’ils font. Ils font des formes, des taches de couleur. Certains se disent que, malgré eux, quelqu’un leur trouvera du génie. Certains ne sont que de pâles copistes… Et tout cet aréopage de gens accepte, finalement, d’exposer. D’autant que le premier prix est un bon d’achat de 500 euros, à dépenser à la supérette (exclusivement), supérette tenue par la belle-sœur de l’habitant organisateur. L’entrée de l’expo est gratuite ! Quel mal y a-t-il à cela ? Alors, il y a quand même quelques bougons que ça dérange d’exposer leurs chefs-d’œuvre en très proche voisinage de vulgaires croutes. S’agirait qu’on ne mélange pas les torchons et les serviettes ! Donc, l’habitant catégorise tout cela du mieux qu’il peut. Mais alors là, ma brave dame, ce sont les crouteux qui se révoltent ! « Quoi ? On nous ostracise ! On nous met dans un coin où personne ne va nous voir ! C’était bien la peine de venir sonner à ma porte ! Et puis lui ? Qu’est-ce qu’il a de plus que moi ? Des bananes avec des pommes et des oranges dans un récipient, avec un morceau de pain et un canon de rouge au bout de la table, on a déjà vu ça mille fois ! Rien d’original. Ok, c’est pas trop mal exécuté, mais faudrait pas crier au génie, non plus ! Moi, je reprends mes chefs-d’œuvre et je vais me faire cuire un œuf ailleurs… œuf que je vais peindre, d’ailleurs. J’suis sûr, que ça plaira à certains. Les amateurs d’œuf… et de poule ! ça existe. Ça porte un nom ! J’suis sûr qu’autour de nous, y a bien un sachant de la veille qui va me trouver ça ! »
Bref, tout ce petit monde s’emporte. Cette expo qui devait être un moment de partage et de plaisir se transforme en pugilat. L’habitant-organisateur est prêt à tout laisser tomber, sauf que… Sauf qu’il faudrait qu’il rembourse les 500 euros du premier prix, les 300 du deuxième, etc. Et comme tout cela doit finir dans les caisses de la supérette, ça lui fait mal aux fesses, tout de même. Donc, l’expo aura lieu !
Et elle a lieu. Elle provoque sourires, sarcasmes, interrogation. On y entend des “pas mal”, des “n’importe quoi”, des “il se prend pour qui celui-là !”, des “bof”, des “hum”, des “ah, ouais !”. Et puis soudain, c’est l’illumination ! Dans un coin, au fond de la salle, quelqu’un a peint une toile qui éclipse toutes les autres. Les visiteurs se pressent, s’agglutinent devant la toile. S’extasient. Il y a, dans cette salle d’exposition, plus de 200 toiles, dessins, pastels… Mais il y a une toile qui retient l’attention de tous.
Mais qui a peint ce chef-d’œuvre ? Vous, monsieur le prof d’arts plastiques ? Non ? Vous, monsieur le graphiste ? Non ? Vous, madame la maire ? Non ? Vous, madame l’écrivaine ? Non ? Mais qui, alors ? C’est l’œuvre de quelqu’un qui s’y connaît, obligatoirement.
Soudain, on entend une voix du fond de la salle.
— C’est Marcel ! qu’a peint c’te toile.
— Marcel ? demande la maire, tout ébaudie.
Elle ne connaît pas de Marcel dans le village. Le prénom s’est perdu au fil des temps. Proust ou Aymé, Achard ou Pagnol en changerait, à notre époque. Ils prendraient un pseudo. Marcel, c’est trop tarte !
— Marcel, répète l’homme.
C’est un petit vieux qui ne sait plus arquer et qui a accepté qu’on installe sa toile au fond le la salle, sans faire d’esclandre.
— Eh bien, dit l’organisateur qui avait un peu méprisé le petit vieux qui lui avait apporté la toile, jugeant l’homme et non son œuvre… voilà un tableau qui méritait que cette expo existe. À lui seul, il justifie toute cette histoire, mon cher Marcel.
— Ah non, dit l’homme. Moi, c’est Jules. Marcel, c’est mon âne à qui j’ai juste tendu le pinceau.

Publié le 03 Août 2022

@Frieda Pouffe
Pourquoi autant de textes ? Parce qu'on est perdus en ce monde sans rivages et qu'on espère trouver dans l'écriture un moyen de se récupérer (et je ne parle pas seulement de trucs autobiographiques).
*
Si pour une frange des auteurs, effectivement, l'écriture est un moyen de ne pas sombrer, cette frange est courte cependant.
En fait, les raisons d'écrire sont nombreuses, et variables eu égard à l'investissement personnel consenti pour boucler quelques pages.
Cela dit, un bon 90% de la production n'est pas -ma main à couper !- le résultat d'une crise existentielle ou identitaire, c'est tout simplement l'effet El Dorado. À titre d'exemple :
https://www.lexpress.fr/culture/livre/l-autoedition-nouvel-eldorado-des-lettres_1765224.html
Révélez à 100 auteurs autoédités qu'ils ne seront jamais signés dans une belle maison, qu'ils ne seront même pas édités dans une de ces pseudo maisons d'édition qui ne rapportent rien que des ennuis ; qu'ils seront à peine lus (par 5 personnes) ; qu'ils ne seront même pas commentés (hihi) et encore moins "étoilés" (ahah). Révélez-leur qu'ils font cela pour "rien", si ce n'est obéir à une forme de vocation, vivre un rêve éveillé, chercher une voie dans la jungle d'une langue, etc., etc.
Eh bien, vous verrez que le nombre de publications descendra vite.
Révélez ensuite à ce même auteur qu'il n'aura VRAIMENT RIEN (parce que vous savez, ma brave Pouffe, à quel point l'espoir est carnassier, il ne lâche pas si facilement sa proie), et le nombre de publications descendra encore.
Mais nous vivons dans une société tellement névrosée, dévastée par l'inquiétude, que la moindre lueur prend des allures de Las Vegas.
*
Pourquoi autant de mauvais textes ?
On en a déjà trop parlé.
En ce qui concerne ce site, il y eut une fenêtre en 2015-2016. Nous étions une petite bande d'écrivaillons assez passionnés et prêts à passer des nuits blanches ou des journées noires au-dessus de nos textes et au-dessus de ceux de nos amis. Mais à la même époque, une autre bande plaidait, baïonnette au canon, pour la facilité, l'empathie, et le wokisme appliqué tous azimuts à la littératoche, comme vous dites.
Ce sont ces derniers qui ont gagné la guéguerre. Ici même.
*
PPS : N'y aurait-il pas comme un genre d'espèce de sorte d'absurdité à confronter, comme vous le faites, Flaubert et Kerouac ?
Oui, l'absurdité est partout en ce bas monde. Et c'est d'ailleurs Jack Kerouac, himself, qui a écrit : "Toute comparaison est odieuse". Il savait, le bougre, que nous échangerions un jour à ce sujet.
*
Quant à Sade, hormis peut-être dans sa "Philosophie dans le boudoir", je le trouve carrément chiant...
C'est votre droit le plus absolu. Mais pour une macarelle de mon genre qui ne connaît de la littérature que San Antonio, Sade est un auteur que la prose enchante.
*
PPPS : quelle audience !

Publié le 02 Août 2022

Avé, Christophorus,
scritores te salutan.
Je n'ai jamais vraiment alimenté la causerie autour du beau, du bon, dubonnet, et du raté, du texte mal truffé. Et, franchement, je ne sais pas s'il faut être Flaubert ou Du Bellay pour se mêler d'écrire, ou s'il faut suivre l'époque qui encourage à se vautrer dans l'écriture comme cochon dans son auge.
Probablement que si l'on prend Flaubert pour exemple (et, grand Dieu, quel exemple sublime), Jack Kerouac est un écrivailleur de tinettes. Et pourtant... Jack, Jack, Jack... quelle prose enivrante.
Parce que la qualité est tout de même une question qui me travaille (et qui, en principe, devrait travailler tout aspirant écrivain), la causerie ou le débat, quelle que soit la forme qu'il prend, m'interroge.
C'est donc ainsi, au fil du temps, que mes réflexions et mes arguments se sont modifiés. Aujourd'hui, je n'ai plus l'impression que l'épicentre du problème soit la qualité des textes en circulation, mais l'intention qui les a fait naître et ensuite les a fait publier. Et je crois que c'est là, la pierre angulaire. Pourquoi AUTANT de textes ? (mettons de côté leurs qualités et leurs faiblesses.) Pourquoi à une époque où de moins en moins de gens lisent (et encore moins les "classiques") nous avons de plus en plus de textes en circulation.
La voilà, l'énigme (bien plus passionnante -ce n'est que mon opinion- que la notation de la production). Pourquoi, ou même pour quoi, écrivons-nous autant ?
Soyons plus spécifique : pour quoi publions-nous autant ?
J'ai bien ma petite idée, mais allez, quoi, c'est l'été, la canicule, la sécheresse, la déshydratation de la faune et de la flore... faut ménager sa monture.
Avé.
Oui (@Sofia Kolokolo), ça peut devenir harassant de lire des textes inaboutis. Pas que harassant, d'ailleurs, déprimant aussi, d'autant que, si l'on est un peu honnête avec soi, on se reconnaît pas mal dans ce genre de prose... Plus difficile de se retrouver dans [...] (moi, en ce moment, c'est Sade. (Sade, on the beach-beach-beach.)

Publié le 01 Août 2022