Un essai sur l’art est d'abord une exploration, une vision, une pensée, un questionnement… sur l’esthétique. Comme tout ouvrage appelé essai, il expose un regard personnel. Il peut se pencher sur une forme d’art en particulier, le travail d’un artiste, une œuvre, un courant ou une discipline artistique… ou sur la question même de ce qu’est l’art. Les sujets sont vastes et les ouvrages nombreux à toutes les époques.
Si autrefois, la notion d’art concernait uniquement les disciplines qualifiées de beaux-arts, le mot art peut désigner aujourd’hui toute production dotée d’une valeur esthétique, et conçoit également l’art comme technique. Les livres qualifiés d’essais sur l’art couvrent ce double champ.
Ces œuvres de réflexion sont documentées, souvent fondées sur des travaux de recherche approfondie, parfois très érudites et puisent dans les domaines du savoir anthropologique, historique et sociologique. Quelle que soit leur forme –traité, leçons, manifeste, critique, méditation, entretiens, exposé, analyse sociologique, réflexion philosophique, illustré ou non…- un essai sur l’art ou une forme d’art expose une pensée qui donne à penser.
Au fil des siècles, il y a eu bien des divergences de définition de l’art, des désaccords sur leur classification, des querelles sur la comparaison entre les différentes disciplines artistiques. On a pu les rapprocher de la querelle des anciens et des modernes en littérature. Ces sujets ont nourri de nombreux essais portant sur l’histoire de l’art et de l’esthétique.
Les domaines qui font l’objet des essais sur l’art dépassent ainsi le seul champ des Beaux-Arts. Ils s’intéressent autant aux arts et traditions populaires, à l’art naïf, l’art brut, le street art… mais aussi à l’art des jardins à la Française ou des jardins modernes, aux arts numériques, à l’art culinaire, l’art de la table, l’art de la fiction…
Les sujets sur lesquels ils se focalisent peuvent aussi bien être des réflexions sur la finalité de l'art, une histoire de ses valeurs, la démarche esthétique de l’art moderne, la démarche conceptuelle de l’art contemporain, des traités sur le travail des artistes… que des ouvrages sur les techniques, les époques, les courants (futurisme, cubisme, fauvisme…), les artistes de toutes les disciplines, les théories de la peinture, du portrait, de la poésie classique, de certaines formes de théâtre… Selon les pays et les cultures, il est évident que le terme art est employé pour des disciplines très diverses qui ouvrent encore le champ des essais : la calligraphie, l’ikebana, le masque africain…
L’essai n’obéit à aucune règle de construction stricte. Il peut avoir des formes très différentes : argumentation pour tout ou partie de l’ouvrage, portrait ou écrit intime de l’auteur, narration et description pour dresser un constat, illustrer un phénomène, relater une situation, dialogue avec un artiste peintre, architecte, écrivain…, un philosophe, un historien… autour d’une question, réflexion appuyée de correspondances…
L’auteur d’un essai propose une délibération sur un thème. Il expose, analyse, c’est une approche critique de son seul point de vue qui peut être polémique ou partisane. Son lecteur attend donc un éclairage original et personnel, pas qu’il épuise son sujet. L’essayiste a ainsi toute liberté de fixer lui-même le périmètre et l’orientation de sa réflexion.
Il y a autant d’essayistes sommités dans les domaines artistiques qu’ils abordent que de non-spécialistes a priori. Ce qui fait la qualité d’un essai c’est l’intérêt de la réflexion, la précision de l’observation, l’originalité du point de vue et la fluidité du style d’écriture. Des auteurs non experts en histoire de l’art peuvent apporter un regard neuf, une alternative au savoir spécialisé et au jargon érudit.
Le mot art vient du latin Ars, artis qui signifie habileté, métier, connaissance technique.
> « Ars pouvant également signifier "métier, talent", mais aussi "procédé, ruse, manière de se conduire" et seulement tardivement "création d'œuvres", terme traduisant le grec "tekhnè". La signification du terme art s'est historiquement déplacée du moyen vers le résultat obtenu ». Dictionnaire des concepts philosophiques.
> « L’œuvre d’art répond à cette définition aussi facile à énoncer que difficile à comprendre : avoir survécu ». André Malraux.
> « Objet résultant d’une transformation positive de la matière visant à l’accomplissement de la forme dans un but dépassant l’intention idéologique ou la simple utilité. » Aude de Kerros, artiste et essayiste, L’art caché - Les dissidents de l’art contemporain.
> « Est de l’art ce que les artistes et le milieu de l’art déclarent être de l’art. » Christine Sourgins, historienne de l’art, médiéviste et critique.
> « Le métier d'art est une technique essentiellement manuelle, mise en œuvre par un professionnel hautement qualifié, une production d'objets uniques ou de petites séries …/… Tout art comme tout métier d'art, conjugue l'imagination créatrice et un ensemble de techniques ». Pierre Dehaye, membre de l'Académie des Beaux-Arts, auteur notamment d’un essai sur la beauté : L'Art : armes des âmes (1994).
Ce sont les muses (nommées par Platon. Ion), qui parrainent les activités artistiques toutes liées aux lettres, aux langages gestuels et musicaux. Les arts plastiques -architecture, peinture…- ne font pas partie des activités artistiques qu'elles parrainent. Dans cette conception de l’art, le poète est l’interprète des dieux.
le classicisme de la fin du XVIIème s. (Boileau), l’idée devenue slogan de L’Art pour l’art portée par des philosophes et romanciers du début du XXème s. comme Edgar Allan Poe et théorisée par Théophile Gauthier (Mademoiselle de Maupin) ou encore l’éloge de l’effort de Paul Valéry (L’éloge du métier).
Les arts distinguaient activités intellectuelles et activités manuelles.
C’est l’époque où l’on passe d’une définition des arts rassemblant des activités artisanales et des savoir-faire particuliers à la notion d’artiste, celle de l’artiste qui signe ses œuvres et est reconnu comme tel, celle où se précise la définition de beaux-arts au-delà de la production plastique artistique depuis l'antiquité.
Dans la tradition académique occidentale, les beaux-arts sont les arts plastiques « visant à l’expression sensible du beau » dit le dictionnaire Trésor de la langue française : peinture, gravure, sculpture et architecture. Quatre disciplines enseignées en France au XVIIème s. à l’École des Beaux-Arts. Puis sont venues s’ajouter la musique, la poésie et la danse.
Les arts continuent au XIXème et XXème siècles à faire l’objet de classifications diverses liées d’une part à l’approche différente de philosophes, argumentée à travers leurs essais, mais aussi aux développement de nouvelles disciplines artistiques.
Hegel par exemple (Esthétique) distingue cinq arts qu’il classe selon le double critère de l’expressivité et de la matérialité. De l'art le moins expressif mais plus matériel à l'art le plus expressif mais le moins matériel : architecture, sculpture, peinture, musique, poésie. « Ces cinq arts forment le système déterminé et organisé des arts réels. En dehors d’eux, il existe, sans doute, encore d’autres arts, l’art des jardins, etc. Mais nous ne pourrons en parler que d’une manière occasionnelle. »
>> L’entrée du cinéma comme forme d’art a été initialement ardemment défendue par le critique franco-italien Ricciotto Canudo, dans son ouvrage La Naissance d’un sixième art - Essai sur le cinématographe (1911), puis dans La gazette des sept arts, le Manifeste du septième art.
>> La classification contemporaine officielle est désormais : 1er art : l’architecture, 2ème art : la sculpture, 3ème art : les arts visuels (peinture, dessin), 4ème art : la musique, 5ème art : la littérature (incluant la poésie et la dramaturgie), 6ème art : les arts de la scène (théâtre, danse, mime, cirque), 7ème art : le cinéma.
>> Mais ça ne s’arrête pas là ! La radio puis la télévision, et la photographie se disputent le qualificatif de huitième art. Quant à la bande dessinée qualifiée désormais de neuvième art, c’est le critique et historien du cinéma Claude Beylie qui en serait à l’origine. La même année (1964), apparait dans le journal Spirou une rubrique consacrée à l’histoire de la bande dessinée et titrée « 9ème art ». En 1996, c’est aussi le titre de la revue du musée de la Bande dessinée à Angoulême. La neuvième place est attribuée !
Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture de l’Abbé Dubos (1719), un ouvrage fondateur réédité à plusieurs reprises.
En affirmant que l’art ne peut pas être uniquement beau, qu’il doit également remuer les cœurs, cet essai a marqué un tournant important dans la pensée esthétique. À une époque qui prend ses distances avec le rationalisme cartésien, la sensibilité en tant qu’expérience des sens donnant naissance au sentiment devient un principe esthétique à part entière. Par la suite, alors que Voltaire promeut l’ouvrage dans son Siècle de Louis XIV, Rousseau radicalise cette position.
Le Musée Imaginaire d'André Malraux explore la relation nouvelle avec l’œuvre d’art imposée par le musée. Édité à l’origine en 1947, ce texte a constitué la première partie de son essai Les Voix du silence, et a été remanié et réédité en 1965.
Éloge de l'ombre, de l'écrivain Jun’ichirō Tanizaki (1993). L'auteur y défend une esthétique de la pénombre en opposition à l'esthétique occidentale où tout est éclairé. Alain Corneau, réalisateur du film Tous les matins du monde (1991. Tiré du roman de Pascal Quignard) demanda à tous ses acteurs de lire cet essai pour s’imprégner de son esthétique.
L’image-mouvement. Cinéma 1 et L’image-temps. Cinéma 2, deux ouvrages formant un essai sur le cinéma dans lequel Gilles Deleuze (1925-1995) se saisit du cinéma pour déployer sa pensée.
L’art à l’état gazeux : essai sur le triomphe de l’esthétique (Stock 2003). Yves Michaud, philosophe, directeur de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts (1989-1997) analyse les pratiques et théories de l’art contemporain au début du XXIème s., nouveau régime esthétique après la modernité et la postmodernité du XXème siècle. En 2007, il publie quatre essai sur L'artiste et les commissaires (Hachette).
L’art caché : Aude de Kerros, artiste et essayiste (2013 - Eyrolles) dresse un portrait précis de près de cent années d’art et d’art contemporain et met à jour un système, celui du marché.
Jacques Darriulat, philosophe de l’art et maître de conférences, illustre à travers les sujets de ses essais le très large champ de réflexion qu’offrent les arts. Outre les nombreux essais édités, il propose sur son site une rubrique essais qui réunit des textes d’articles, de conférences et d’entretiens : Caravage et l'opéra ; La statue amoureuse et le complexe de Pygmalion en passant par Chateaubriand, Eichendorff, Mérimée, Heine, Gautier et Freud ; Le rossignol et la diva consacré aux diverses valeurs que prend le chant de l'oiseau depuis le Parallèle sur les Anciens et les Modernes de Charles Perrault jusqu'à l'opéra de Stravinsky Le Rossignol ; Du caractère à la caricature ; Le jardin à la française ; Le tableau et le miroir…
Il n’est pas nécessaire d’être philosophe ou historien de l’art, il vous suffit d’avoir un regard particulier sur une discipline, un artiste, une pratique artistique particulière, un courant… et d’exposer votre point de vue.
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