Trois histoires s’entremêlent dans ce polar débordant de ses cadres. Tout d’abord, un joyeux délire kafkaïen, si vous me permettez cet oxymore, autour d’une disparition, d’un meurtre, d’un procès, où l’on voit à l’œuvre deux personnages croustillants. L’avocat Jean-Jérôme, leader d’un groupe transhumaniste d’inspiration marxiste, prônant la remise des fonctions de l’État à des intelligences artificielles (IA) qui ne connaissent pas de pulsions dominatrices, contrairement aux humains. La juge Weber, imperturbable, préfiguration paradoxale des IA par lesquelles le transhumanisme de Jean-Jérôme voudrait la remplacer. La deuxième histoire qui court à travers la trame narrative de ce polar fait état des relations amoureuses ardues entre Vincent, auteur en quête d’une « bonne idée » de roman dans Wikipédia, et Léa, qui l’a quitté pour… non, non, je ne vous dirai pas pour qui, ni pourquoi. Ce sont, entre eux, des péripéties tumultueuses, parfois un peu lourdes comme au chapitre 18, où Vincent relit les textos qu’ils se sont échangés au fil du temps, ou au chapitre 22, dans un long retour sur les imbroglios amoureux de leur jeunesse. Enfin, troisième histoire qui tresse le récit, une évocation des rapports ambigus, au XVIIe siècle, entre saint Vincent de Paul et quelques dévotes de son entourage. Je n’ai pas trop compris ce que cette plongée lointaine vient faire dans cette intrigue… Rabelais est tombé quelques fois lui aussi dans une certaine forme de prodigalité, ce qui ne l’a pas empêché de me faire rire aux éclats, tout comme vous êtes arrivé, Philippe, à le faire. Bravo pour la fin inattendue de votre roman!
Publié le 14 Mai 2024